COUR SUPRÊME DES ÉTATS-UNIS : LA GUERRE CIVILE CULTURELLE
Régis de Castelnau – Vu du droit – 25.6.2022
Les réactions au revirement de la jurisprudence de la Cour suprême des États-Unis concernant l’avortement témoignent une fois de plus d’une ignorance, d’un provincialisme et au final d’une arrogance française classique, le tout donnant un triste brouet qui n’est pas à notre honneur.
Tout d’abord la précaution d’usage : je suis personnellement favorable au principe de l’IVG qui est une possibilité d’utiliser l’avortement comme un moyen de régulation des naissances. Je n’ai aucun problème moral ou religieux concernant cette possibilité, même si je sais que c’est toujours une épreuve pour la femme qui doit y recourir.
La fascination de nos élites pour les USA, y compris celles qui se disent d’extrême gauche est quelque chose de quand même impressionnant.
Surtout que cela s’enracine dans l’ignorance d’une réalité : les États-Unis sont un État fédéral. Contrairement à ce qu’on pense, le pouvoir de Washington et en particulier celui du président n’est pas très étendu par rapport à celui des États fédérés. Et la décision qui vient d’être rendue par la Cour suprême relève de cette articulation. Revenant sur sa jurisprudence antérieure, elle a considéré que la question de l’IVG était de la compétence des États et qu’il ne lui appartenait pas de dresser sur cette question, un cadre contraignant supérieur à celui de ses législations locales. Raisonnement identique à celui fait par la Cour de Justice de la Communauté européenne qui a dit que cette question était de la compétence des législations internes des états membres de l’UE. Et d’ailleurs, à l’aide des mêmes motivations que celles adoptées par la cour suprême américaine. C’est donc désormais l’affaire des Américains, chacun dans leurs États respectifs.
Paradoxalement, je m’en réjouis de cette jurisprudence en Europe, lorsque je vois ce qui se passe par exemple en Europe centrale et notamment en Pologne. Je me trompe peut-être, mais je pense que notre pays est à l’abri d’une régression identique.
Mais finalement, comment être surpris de ce qui se produit aujourd’hui aux États-Unis et qui consterne les élites européennes ? Les mêmes élites qui réclament l’inscription du « droit » à l’IVG dans la constitution alors qu’ils traitent immédiatement de raciste islamophobe quiconque se permet de critiquer la religion musulmane, pourtant guère laxiste sur ces questions. Comment s’imaginer que les délires que l’on va qualifier par commodité de « wokistes », qui font des revendications LGBTQI etc,etc…souvent ineptes un idéal humain que l’on voudrait, bardé de son arrogance occidentaliste, imposer à la planète, ne vont provoquer aucune réaction ni contradiction. Les États-Unis ont élu un président quasiment en état de démence sénile, qui présente triomphalement son bilan : « il y a plus de personnes LGBT dans mon administration que dans toutes les administrations précédentes réunies ! » Disparue la compétence comme critère d’embauche au service de sa mission, non non, l’idéal c’est l’obsession de la race, et de la sexualité pour classer les gens. « Mon administration est bonne puisqu’il y a tant d’homosexuels, tant de lesbiennes, tant de transgenres, tant de noirs le faisons, tant de latinos etc. etc ». Et comment ne pas être effaré lorsque l’on apprend que George Soros finance grassement des candidats au poste de procureur (qui sont élus aux États-Unis), dès lors qu’ils présentent un CV qui garantira que les poursuites pénales seront fonctions de la couleur de la peau et de l’orientation sexuelle.
La bourgeoisie néolibérale française comme les Britanniques, les canadiennes et américaines, raffolent de l’intersectionnalité, et la petite bourgeoisie intellectuelle déclassée ou pas, partage cette passion. Qui a pour premier mérite de stériliser la lutte des classes.
Quand on refuse d’utiliser le mot de « femme » au profit de celui de « personne portant un utérus » comment s’étonner que cela provoque en retour une réaction dont la décision de la cour suprême des États-Unis n’est qu’une des expressions. Ce pays est désormais marqué lourdement par ce que l’on peut qualifier de « guerre civile culturelle » qui est en train de gangrener son système démocratique. Et nos élites stupides, fascinées par les pires côtés américains, font tout pour importer ce conflit chez nous.
La tentative d’inscrire l’IVG dans la Constitution pour la sanctuariser en la mettant l’abri de la délibération démocratique illustre une nouvelle fois la fameuse citation de Bossuet sur ceux qui se plaignent des conséquences de leurs actes. Parce que cette proposition strictement défensive, vouée à l’échec, est déjà une défaite. Le risque de mise en cause de l’IVG se nourrit complètement de la réaction à la mise en œuvre furieuse d’une idéologie absurde.
Après l’explosion BLM de 2019 avec l’affaire George Floyd, les démocrates voulant battre Trump à tout prix ont enfourché la cause Woke. Essayant d’en faire une idéologie d’État.
Qu’on le veuille ou non, l’Arrêt de la cour suprême des États-Unis est le fruit politique de cette folie. Dont le droit des femmes à choisir leur maternité sera la victime.
Source : Cour suprême des États-Unis : la guerre civile culturelle – Vu du Droit
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Juillet 2022
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