Démences /6

 

 

 

 

 

 

Où y’a de la gêne, y’a pas de plaisir

 

(Histoire d’une dent)

 

 

 

 

Les Belges, à défaut des autres, ont peu de chances d’ignorer que le malheureux chargé de se trimballer la couronne en fer blanc que nous ont imposé nos maîtres anglo-sionisto-five eyes et on en passe, s’est vu coller en outre la corvée d’aller offrir aux Congolais (en signe de bonne volonté n’en doutons pas) tout ce qui reste de feu leur Premier ministre Patrice Lumumba : une dent.

Ce n’est certes pas sa faute si son oncle, chapeautant tout ce que la Belgique comptait de plus loyal à l’empire, a fait exécuter dans des conditions révoltantes le représentant élu d’une grande nation, pour le dissoudre ensuite dans un bain d’acide, histoire qu’il ne revienne jamais fût-ce en cadavre. Moins une dent, dont s’est emparé (souvenir ?) un dénommé Soete,  qui l’a montrée à tout le monde pendant des années (trophée ?).

Toujours est-il que les aigles qui prétendent nous gouverner (et qui nous achètent – merci ! – du gaz pour l’hiver prochain chez des champions de l’apartheid) ont réussi à se la procurer (la lui ont payée ?). Et c’est elle que l’infortuné monarque est chargé d’oser aller offrir aux Congolais. Dans quel but ? Faut pas demander. Nous, si on était eux, on se méfierait. Timeo Danaos… et ils ne sont même pas grecs.

En attendant que les Chinois soient à Cognac et remettent un peu d’ordre dans tout ça, que faire sinon rougir de honte et traîner le boulet qu’on s’est laissé mettre au pied ?

 

 

 

 

Restitution « des » dépouilles de Patrice Lumumba : le gouvernement belge assume-t-il ses responsabilités ?

 

Ludo de Witte – Investig’action – 20.6.2022

 

 

 

 

 

 

Le 20 juin 2022, le Premier ministre De Croo remet la relique de Patrice Lumumba à ses proches en présence des autorités congolaises. Il s’agit d’une dent provenant du corps du Premier ministre congolais, dissous dans de l’acide sulfurique. Il a été assassiné au Katanga début 1961, moins de sept mois après l’indépendance. Le commissaire de police belge Gerard Soete, qui avait détruit le corps, a conservé une partie des restes jusqu’à sa mort pour les exhiber à son entourage comme un trophée de chasse. Ce n’est que bien plus tard que cette dent a été confisquée dans  sa succession, chez sa fille.

La question qui se pose est de savoir si la Belgique profitera de cet élan pour traiter de manière appropriée ce passé invraisemblable et le traduire en mesures à l’avenant. Car cette petite relique symbolise la façon dont nos élites ont tordu le cou à la jeune démocratie congolaise et ont fui leur responsabilité dans cette affaire pendant six décennies, malgré le corpus delicti qui se trouvait juste sous leur nez. À cette occasion, que dira le Premier ministre De Croo sur le rôle de la Belgique dans ce meurtre et sur l’impunité choquante qui règne dans cette affaire ?

Pour rappel, quelques faits marquants. La commission d’enquête parlementaire qui a étudié le rôle de la Belgique dans ce crime en 2000 et 2001 n’a reconnu que la « responsabilité morale » des autorités belges pour ce meurtre. Les faits démontrant un rôle joué par les émissaires et les ministres belges ont été, pour ainsi dire, balayés comme poussière sous le tapis par cette décision vide de sens. Le gouvernement Verhofstadt a ainsi voulu éviter toute responsabilité concrète pour un crime aux conséquences désastreuses pour le Congo et l’Afrique centrale.

Si les autorités belges veulent évoquer de manière crédible leur attachement aux valeurs telles que la démocratie, les droits de l’homme et la paix, elles doivent reconnaître leurs responsabilités à l’occasion de la restitution :

* Les ministres, diplomates et officiers belges ont joué un rôle décisif dans le renversement du gouvernement congolais démocratiquement élu et la liquidation du Premier ministre.

* Pendant quatre décennies, jusqu’à sa mort en 2000, Gerard Soete a montré la relique du leader congolais à son entourage et à au moins un journaliste. Même lorsque Soete en a parlé dans la presse, la commission d’enquête Lumumba, qui avait tous les pouvoirs d’un juge d’instruction, ne l’a pas dérangé.

* En 2011, la famille Lumumba a déposé une plainte contre douze Belges pour leur implication dans l’assassinat. La plainte a été déclarée recevable. Il n’y a pas de prescription, puisqu’il s’agit d’un crime de guerre dans lequel des Belges ont été impliqués. Néanmoins, le ministère de la Justice n’a jamais mené d’enquête pour retrouver les restes auprès des proches de Soete. C’est seulement en 2016 que le Parquet a effectué une perquisition au domicile de sa fille. Cette action était le résultat du travail d’investigation du journaliste Jan Antonissen et d’une plainte déposée par moi-même pour recel de restes mortels.

* On pourrait s’attendre à ce que la représentation de la décolonisation du Congo, du Rwanda et du Burundi (1958-1965) fasse l’objet d’une grande attention dans l’AfricaMuseum rénové (2018). Au cours de cette période, les colonies ont été converties en régimes néocoloniaux, avec pour références la liquidation du gouvernement Lumumba, la « révolution Hutu » au Rwanda et l’assassinat du Premier ministre burundais Rwagasore. Le résultat, cependant, est décevant. Un collage de couvertures de magazines est appliqué sur une colonne, n’évoquant qu’un chaos incompréhensible. Pas d’interprétation ni d’analyse. Sur un écran tactile, les visiteurs peuvent lire que le coup d’État de Mobutu (1965) fut « une intervention salutaire »…

* Pendant ce temps, l’enquête judiciaire s’éternise. Le procureur fédéral a déclaré en 2020 – 9 ans après le début de l’enquête – que les procès-verbaux des séances à huis clos de la Commission Lumumba n’avaient toujours pas été réclamés … par manque de personnel ! Ce n’est que cette année que les enquêteurs du Parlement ont embrayé. Pour l’instant, le Président du Parlement refuse de remettre les documents, alors qu’une modification du règlement intérieur permettrait de le faire. Entre-temps, dix des douze personnes figurant sur la liste sont déjà mortes. Veulent-ils faire traîner l’enquête jusqu’à ce que tous les accusés soient morts afin de pouvoir classer l’affaire sans suite ?

* Typique d’une certaine mentalité : à la mi-2020, le tribunal de Bruxelles a fait savoir que les proches de Lumumba pouvaient venir chercher ses restes au greffe du tribunal. Comme s’il s’agissait d’un portefeuille perdu …

* À part les quelques mètres carrés du square Lumumba, entre une station de taxis et le périphérique intérieur de Bruxelles, aucun lieu significatif de la capitale ne porte le nom du Premier ministre congolais. N’est-il pas significatif que cette modeste victoire n’ait été obtenue que grâce à des années d’efforts de la part de quelques associations belgo-congolaises ? Alors que les statues de Léopold II et les rues portant le nom de celui dont le règne de terreur a coûté des millions de vies, de même que les monuments glorifiant la colonisation en général, continuent de colorer les espaces publics, sans aucune indication interprétative ?

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Source : https://www.investigaction.net/fr/restitution-des-depouilles-de-patrice-lumumba-le-gouvernement-belge-assume-t-il-ses-responsabilites/

 

 

Admettons-le, la Belgique détient au moins un record que personne ne lui prendra : elle sait comment pulvériser les limites du sordide.

 

 

 

 

Rappelons que les lettres belges ont produit un seul livre où la mémoire de Patrice Lumumba n’ait pas été traînée dans la boue, et dont l’auteur, écrivain de haute volée, est toujours – pour cela – ostracisé avec beaucoup de constance et d’acharnement par les Zélites belgeoises.

 

 

(Livre et couverture indisponibles)

Jean-Louis Lippert

MAMIWATA

Talus d’approche, 1994

15cm x 21cm

435 pages

 

Mamiwata fut victime, dès sa sortie, d’une cabale qui dure encore.

 

 

 

 

 

 

In memoriam :

 

L’aède Lumumba ne meurt pas

 

 

 

 

 

 

Patrice Lumumba ne fut pas seulement une figure politique de premier plan. Il est devenu rapidement un mythe littéraire, au sens le plus fort, comme l’incarne notamment la pièce d’Aimé Césaire Une Saison au Congo. À l’heure où le journaliste Ludo De Witte fait paraître un livre établissant les responsabilités de l’État belge dans l’assassinat du Premier Ministre congolais de l’Indépendance, Jean-Louis Lippert reparle du « Satan de Stan », l’une des figures tutélaires de son roman Mamiwata.

 

L’Afrique est là et elle n’est pas là. Son cadavre non encore né hante le monde civilisé. Un foyer moyen de chez nous ne consomme-t-il pas chaque année le revenu de mille familles congolaises ? Économie cannibale oblige, nous avons tous mille nègres dans notre frigidaire. Quel effet sur nos rêves, nos mémoires, nos consciences ? Mais l’art, la pensée, la culture occupent-ils dans cette société la part du cœur et de l’esprit dans l’organisme humain ? Quel rapport entre nos réalités, nos représentations ? Quelle communion quand tout n’est qu’intérêts particuliers ? Où les êtres, réduits à l’état d’objets, ne voient accorder le statut de sujets qu’à une représentation falsifiée d’eux-mêmes sur le marché des images, Patrice Lumumba paya de sa vie le crime d’avoir posé la question de l’humaine universalité. On voudrait réduire cet assassinat à quelque exaction de l’État, quand c’est la société belge entière, coloniale et métropolitaine, qui fomenta son élimination physique aussi bien qu’elle arma les basses œuvres.

 

 

 

 

 

 

Dès l’entrée de Lumumba sur un âne à Bruxelles, on savait que ce nègre était de trop. Car l’aède est l’hôte éphémère d’une parole singulière et plurielle qui n’est nulle part chez elle.

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Source : https://www.spherisme.be/Texte/AedeLumumba.htm

 

 

 

 

 

 

Mis en ligne le 27 juin 2022

 

 

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