Cartes de pointage… Cartes de pointage…

On ne peut pas parler d’Al-Qaïda sans Carte de pointage !

 

Dennis Kucinich – 2.2.2025

Traduction :  c.l. pour L.G.O.

 

 

Quand j’étais gamin et que j’assistais aux matchs de baseball des Indiens de Cleveland à l’ancien stade municipal, un type mince coiffé d’une casquette de baseball des Indiens courait dans les travées en vendant des cartes de pointage aux cris de : « Cartes de pointage… Cartes de pointage… On ne peut pas repérer les joueurs sans Carte de pointage ! ».

Il avait raison. Les Cartes de pointage indiquaient le nom, le numéro et la place du joueur sur le terrain. Au fil des pages, on  pouvait s’amuser à compter les points, suivre les courses, les coups et les erreurs des joueurs, par toutes sortes de notes ésotériques portées sur la fameuse Carte de pointage.

Le baseball a évolué au fil du temps. Les marqueurs désignés ont modifié la stratégie du jeu, la limitation des visites au monticule et les horloges à lancer ont accéléré le jeu, les Cartes de pointage sont dévenues numériques. et les Cleveland Indians ont changé de nom pour devenir les Guardians.

Ce qui m’amène à la Syrie

La question de la Syrie semble retenir toute l’attention de la commission sénatoriale sur le Renseignement… aussi longtemps qu’il s’agit de passer au crible le régime Assad déchu, mais elle n’a pas l’air de comprendre le rôle joué par la CIA pour placer Al-Qaïda, ou quel que soit le nom qu’on lui donne aujourd’hui, dans le siège du conducteur à Damas.

Oui, vous avez bien lu, les dollars des contribuables US, que ce soit ou non par erreur, ont été versés entre les mains de djihadistes, de consorts d’Al-Qaïda, d’aventuriers hétéroclites et de soldats de fortune, dans le but de faire tomber Assad.

L’ex-députée républicaine Tulsi Gabbard, d’Hawaï, et le sénateur Rand Paul ont tenté d’attirer l’attention du Congrès sur cette question en introduisant la proposition de loi « Arrêtons d’armer les terroristes ». Malheureusement, cette proposition est restée lettre morte et les USA ont continué d’armer les terroristes.

Bien entendu, les USA n’ont pas été le seul État-nation à jouer en Syrie, qui est devenue une zone de compétition entre grandes puissances. La Russie et l’Iran ont tenté de soutenir la Syrie, tandis que la Turquie apportait son soutien à Hayat Tahrir al-Sham (HTS).

Les meurtrières et trompeuses machinations d’État, sous prétexte de « libérer le monde de la menace d’Al Qaïda », n’excusent en rien les lacunes flagrantes ou les terribles abus du régime syrien. [ tandis qu’elles excusent celles et ceux des USA ? NdT]

Mais quand Al-Qaïda, ses héritiers et ses ayants droit ont, d’une manière ou d’une autre, entrepris le voyage surréaliste qui les a amenés, de l’écrasement d’avions sur les tours du World Trade Center, le Pentagone et un champ du comté de Somerset, Pennsylvanie, au sommet du pouvoir avec l’aide d’une agence de renseignement US qui s’est pris les pieds dans un de ses changements de régime, il serait temps d’aller voir ce qui se passe sur le terrain.

Je pense qu’aucun Américain qui avait plus de six ans le 11 septembre 2001 ne pourra jamais oublier ce qui s’est passé ce jour-là ni qui en est responsable. Moi, je n’ai certainement pas oublié.

En tant que membre du Congrès pendant 16 ans, j’ai tenu le compte des points, des coups marqués et des erreurs commises par notre pays au Moyen-Orient, dans le but de mettre en garde contre les conséquences de la politique US dans la région. Voici donc une « Carte de pointage » sur la Syrie, que mes lecteurs pourront s’ils veulent numériser et envoyer à leur représentant au Congrès :

Le nouveau chef autoproclamé de la Syrie est né Ahmad Joulani. En tant que membre d’Al-Qaïda en Irak, opérant sous les ordres d’Al-Zarqawi, il s’appelait Abu Mohammad al-Joulani, nom qu’il a conservé, tandis qu’Al-Qaïda en Irak (la branche d’Al-Qaïda fondée par Oussama ben Laden en 1988) se transformait en État islamique d’Irak (ISI), puis en État islamique d’Irak et du Levant (ISIL).

Lors de l’expansion d’Al-Qaïda en Irak en 2011, Joulani a reçu la franchise syrienne d’Al-Qaïda et l’a rebaptisée Jabhat al-Nusra (Front al-Nosra). En 2016, des rapports de presse ont affirmé que Joulani s’était séparé d’Al-Qaïda, la chose ressemblait davantage à un fractionnement d’actions qu’à une rupture. Joulani a dès lors rebaptisé son groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a pris le contrôle de la Syrie et s’est même rebaptisé Ahmed al-Chareh.

En résumé, Al-Qaïda s’est transformé en Al-Qaïda en Irak, en État islamique d’Irak (EI), en État islamique d’Irak et du Levant (ISIL), (qui s’appelait à l’origine Jaish al-Ta’ifa al-Mansurah), en État Islamique d’Irak et de Syrie (ISIS, acronyme arabe « Daech »), puis en Jabhat al-Nosra, et est maintenant connu sous le nom de Hayat Tahrir al-Sham (HTS). Joulani, pour sa part, est passé d’Ahmad Joulani au djihadiste Abu Mohammad al-Joulani, et est maintenant Ahmed al-Chareh, président de la Syrie.

Vous ne pouvez pas repérer ces joueurs sans Carte de pointage.

La CIA est toujours la CIA. Elle a marqué un grand but en Syrie. Après que le président Obama ait eu signé, en 2011, le décret présidentiel chargeant l’agence d’exécuter le changement de régime en Syrie, et non sans avoir dépensé des milliards de dollars des contribuables US sur treize ans, elle a réussi à détruire l’État syrien, à destituer Bachar al-Assad et à installer une plantation de terrorisme au cœur du Levant.

L’Agence a financé la plupart des activités djihadistes en Syrie par le biais de l’opération Timber Sycamore, nom ambitieux, puisque certains platanes* sont réputés vivre plus de 500 ans. Ce sycamore a été abattu par le président Trump en 2017, peu de temps après son entrée en fonction.

La mauvaise nouvelle, c’est que, tout comme Al-Qaïda, né du soutien des contribuables US aux combattants islamistes contre les Soviétiques (et tout comme les Talibans nés des moudjahidines), le contrecoup des entreprises moyen-orientales US en Syrie est également susceptible de se terminer par un jeu meurtrier aux multiples conséquences.

Quand cela arrivera, les noms seront changés pour protéger les coupables.

Le jeu changera-t-il ?

Gardez cette Carte de pointage sous a main à titre de référence et décidez par vous-mêmes.

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« Unicum platanum vidimus » (nous n’avons vu qu’un  seul platane) : lettre de Rabelais à l’évêque de Maillezais, qui l’avait chargé de lui en rapporter d’Italie (15 février 1536). Il y a 489 ans tout juste, le temps d’arriver par la poste à cheval.

 

 

Dennis J. Kucinich (1946), d’origine yougoslave, catholique favorable au droit à l’avortement, ex-Démocrate, maintenant Indépendant.

Maire (à 31 ans) de Cleveland, Ohio.

Représentant au Congrrès US pour le 10^e district de l’Ohio, de 1987 à 2013

Directeur de campagne de Robert F. Kennedy Jr, en 2024

 

 

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Janvier 2025