Oscar van Heerden : Méfiez-vous des changements de régime, le stratagème nous fonce dessus
Oscar van Heerden – News 24 – 27.7.2023
Traduction : c.l. pour L.G.O.
Oscar van Heerden demande si la visite de Victoria Nuland, sous-secrétaire d’État US aux affaires politiques en Afrique du Sud le mois prochain ne signifie pas bien autre chose que ce qu’on pourrait croire
La sous-secrétaire d’État US aux affaires politiques, Victoria Nuland, lors d’une conférence de presse à Colombo en février.
Les stratagèmes sont des plans ou des combines, ceux, en particulier, qui sont utilisés pour rouler un adversaire ou atteindre un but non avoué.
« Une série de stratagèmes sournois » est le nom d’une œuvre d’art, mais est-ce vraiment ce qu’a en tête l’infâme belliciste Victoria Nuland, sous-secrétaire d’État US aux affaires politiques, pour quand elle viendra visiter notre pays bien-aimé le mois prochain ?
Après tout, elle est fort connue pour préférer les tactiques diplomatiques qui consistent à renverser plutôt qu’à discuter.
Il semble que cela ait été le cas en 2014, lors d’un prétendu « soulèvement populaire » du peuple ukrainien contre son président démocratiquement élu, qui a dû fuir le pays. Des rumeurs circulent selon lesquelles Mme Nuland, qui était alors secrétaire d’État adjointe aux affaires européennes, aurait aidé à orchestrer ledit soulèvement.
Mme Nuland faisait partie de l’administration du président Bill Clinton lorsque son gouvernement a envahi la Somalie. Elle était présente avec l’administration Bush lorsque celle-ci a envahi l’Irak et tué Saddam Hussein, et elle l’était encore lorsque le président Barack Obama a envahi la Libye et tué son dirigeant. C’est manifestement son point fort. Pardonnez-moi donc si je suppose que sa visite au bon moment, à quelques mois de nos prochaines élections générales, ne peut pas être une coïncidence.
Courtiser l’opposition
Il me semble évident que le gouvernement des États-Unis a courtisé le parti d’opposition officiel, la DA, tout au long de ces derniers mois. Prenons, par exemple, la visite aux États-Unis du Premier ministre du Cap-Occidental, Alan Winde, qui a prétendu parler au nom du pays alors qu’il n’avait aucun mandat. Il a fait des remarques qui dépassaient largement son niveau de compétence en disant vouloir arrêter le président Poutine s’il mettait les pieds en Afrique du Sud.
Le chef de la DA a entrepris de se rendre en visite officielle en Ukraine et il y a fait toutes sortes de déclarations alors que lui et son parti savent parfaitement que les affaires de l’État et la politique étrangère sont du ressort de l’exécutif. Il ne fait aucun doute que ces visites aux États-Unis s’accompagnent également d’un financement plutôt généreux de la DA en vue des prochaines élections générales.
Espérons que le pacte moonshot ne sera pas trafiqué pour servir de tels stratagèmes. Il n’y a rien de mal à une politique d’opposition saine, mais si elle est soutenue par des gouvernements étrangers, dans le but d’imposer leur volonté au lieu de celle du peuple sud-africain – c’est de la trahison et rien d’autre.
Il existe divers stratagèmes pouvant conduire à un changement de régime. Le plus connu est le coup d’État militaire. Éventualité peu probable en Afrique du Sud,. Le suivant est une révolution, comme nous l’avons vu en Égypte ces dernières années. C’est toujours une possibilité si on pense aux inégalités et aux niveaux de pauvreté auxquels nos concitoyens doivent faire quotidiennement face.
La forme la plus rare de changement de régime, toutefois, est celle où un gouvernement démocratique est transformé en quelque chose d’autre, en une autre forme de gouvernance peut-être. Mettons en un régime plus autoritaire.
Il y a déjà des rumeurs selon lesquelles, en cas de répétition de l’action de protestation de juillet 2021, au cours de laquelle des quantités massives de personnes pillent, brûlent et détruisent, la circonstance serait idéale pour un stratagème de changement de régime.
Personnellement, je pense que la population sud-africaine n’est pas si naïve ni si crédule. Si l’apartheid nous a appris quelque chose, c’est la politique, et la plupart d’entre nous peuvent voir à venir les stratagèmes à un kilomètre et demi de distance.
L’assassinat de Chris Hani, qui a eu pour but de faire dérailler les négociations et d’exaspérer notre peuple à un point tel qu’il était censé provoquer le chaos et mettre fin à ces négociations, n’a pas fonctionné en raison de la maturité des Sud-Africains.
L’appât de la subvention d’un revenu de base pendant des années de la part de la DA visait également à tromper notre peuple en tentant de lui faire croire que, s’il votait DA, son sort s’améliorerait à jamais – et pourtant la majorité des gens continue de voter pour l’ANC parce que, encore une fois, leur maturité dans la compréhension de la politique est ce qui les empêche de tomber dans le piège de ces astuces bas de gamme.
La diplomatie du carnet de chèques
Je soupçonne que, si le stratagème de Nuland est d’inciter notre peuple à se révolter contre le gouvernement, il lui faudra le revoir. Une meilleure approche serait de venir en Afrique du Sud avec la diplomatie du carnet de chèques.
Selon le magazine Foreign Policy, le but de sa visite est de venir faire pression sur l’Afrique du Sud pour qu’elle réévalue ses relations avec la Russie. Conformément à ce type de pression, en juin, un groupe de sénateurs américains a exhorté l’administration Biden à reconsidérer la tenue du sommet commercial de l’AGOA en Afrique du Sud, estimant que cela pourrait être considéré comme une approbation de la position de l’Afrique du Sud sur la guerre russo-ukrainienne. Cela met en évidence les appréhensions croissantes de certains décideurs US concernant l’alignement perçu de l’Afrique du Sud avec la Russie..
On ne peut s’empêcher de se demander s’il y a pas dans tout cela bien plus que ce que l’on peut voir. Après tout, le fait que l’Afrique du Sud fasse partie de l’alliance des BRICS et organise leur prochain sommet ici à Mzansi ne convient pas vraiment à de nombreux pays occidentaux.
Les BRICS discuteront, entre autres, sérieusement, des questions polémiques d’une monnaie commune entre eux et de l’élargissement de l’adhésion aux BRICS. Ces deux questions représentent un danger clair et immédiat pour l’hégémonie des États-Unis et de leurs alliés occidentaux.
Ce qui reste non négociable pour le gouvernement sud-africain, basé sur des principes plutôt que sur du romantisme historique, ce sont ses principes de souveraineté et de non-ingérence, en même temps que l’on s’engage avec diverses puissances mondiales. Pour naviguer dans ces relations avec les grandes puissances, comme les États-Unis, la Russie et la Chine, il faut des compétences qui exigent une maîtrise minutieuse de la diplomatie et un service sans faille des intérêts nationaux.
La génération actuelle de néo-conservateurs à la Maison Blanche ferait mieux de réfléchir très sérieusement aux prochaines démarches qu’elle veut entreprendre.
Quel que soit le côté du conflit russo-ukrainien que vous défendez, cette guerre continue d’être dévastatrice pour le peuple ukrainien et elle doit tout simplement cesser. La guerre par procuration s’est retournée contre l’Occident global, et persister à se faire des ennemis est une entreprise téméraire. Ce dont vous avez besoin, ce sont des amis et des alliés, alors changez de stratagème, Nuland !
Tactique US classique
J’entends certains d’entre vous demander sur quoi je fonde toute cette analyse. Eh bien, selon Brian Berletic, analyste géopolitique et ancien soldat de la marine US, ce stratagème est un classique américain, et je suis tout à fait d’accord avec lui.
Chaque fois que les États-Unis se lancent dans quelque forme de confrontation avec un pays, ils commencent d’abord leur offensive par de soi-disant engagements diplomatiques. Ils le font uniquement pour pouvoir dire ensuite « regardez,, nous avons essayé de les raisonner, mais hélas…. » Cela sert à justifier tout ce qu’ils choisiront de faire ensuite aux pays en question.
Vous n’avez qu’à regarder ce qu’ont fait les États-Unis au fil des ans. En Libye, par exemple : diverses missions diplomatiques ont précédé de plusieurs mois le changement de régime final. Idem en Irak : les États-Unis ont envoyé de nombreux responsables à Bagdad, avant de faire carrément la guerre à ce pays.
Maintenant, nous voyons un certain nombre de hauts fonctionnaires US s’en aller en visite en Chine, y compris le secrétaire d’État Blinken, Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, et plus récemment un Henry Kissinger âgé de 100 ans, tous sous le couvert de missions diplomatiques.
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Juillet 2023
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