Mais si, il reste des hommes
(suite)
Rassurez-vous, il en reste bien plus qu’on ne vous en montre. C’est juste la mini-galerie des Grosses Orchades qu’on partage. Vous verrez que, dans ceux-ci, il y a deux morts. Mais ils ont laissé derrière eux de si persistants petits spermatorzoïdes de beauté qu’on les compte parmi les vivants.
Le Saker
Ceux qui ne le connaissent pas à présent le font exprès. Voici sa dernière réflexion en date :
Une semaine dans la vie de l’empire
The Saker.is – via The Unz Review – 9.5.2019
Traduction : Le Saker francophone
« Je réalise également que la survie de l’espèce humaine dépendra de Poutine et de Xi et de leur capacité à désarmer ou neutraliser progressivement la menace américaine sans déclencher une guerre nucléaire. »
Préambule : Il est parfois utile de ne pas seulement examiner une question spécifique en détail, mais plutôt de faire une enquête sur les processus en cours. L’image qui en résulte n’est ni meilleure ni pire, elle est simplement différente. C’est ce que je veux faire aujourd’hui : observer de près notre planète qui souffre.
Poutine lutine l’Empire
C’est très simple : si les Ukrainiens donnent des passeports à des citoyens russes et que nous leur remettons des passeports russes, en Russie, tôt ou tard, nous obtiendrons le résultat escompté : tout le monde aura la même citoyenneté. C’est quelque chose que nous devons saluer. Vladimir Poutine
Il semble que le Kremlin modifie très lentement son approche de la question ukrainienne et s’appuie désormais davantage sur des actions unilatérales. Les deux premières mesures prises par les Russes ne sont peut-être pas « trop peu, trop tard », mais certainement « le strict minimum et un peu tard ». Néanmoins, je ne peux que saluer la nouvelle détermination du Kremlin. Plus précisément, le Kremlin a interdit l’exportation de produits énergétiques vers l’Ukraine – des dérogations spéciales peuvent encore être accordées au cas par cas – et les Russes ont décidé de distribuer des passeports russes à la population de Novorossie. Une bonne chose.
Source : https://lesakerfrancophone.fr/une-semaine-dans-la-vie-de-lempire
sont sept…. et on ne sait même pas s’il y a une ou des femmes dedans, mais, comme Le Saker, ils parlent des dangers de guerre qui terrorisent, et, comme Vladimir Ilitch Oulianov, ils sont d’avis que, seule, une guerre civile des peuples à leurs va-t-en-guerre peut nous sauver tous.
Le danger de guerre se précise chaque jour
Robert Bibeau – 13.5.2019
Nous présentons trois articles de trois sources crédibles qui exposent par des faits le danger de guerre meurtrière qui menace. Le prolétariat seul peut y mettre fin en affirmant simplement – « Nous ne nous battrons pas. Votre guerre se fera sans nous et contre nous ». Robert Bibeau. Éditeur. Le webmagazine Les7duquebec.com
Alors que la presse européenne continue d’être absorbée par la promotion des élections européennes (bidon – NdT), les tensions impérialistes mondiales continuent de s’exacerber, ce qui indique de nouvelles sources immédiates de conflits des Caraïbes au Pacifique en passant par le golfe Persique.
Source : http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs-2-2/le-danger-de-guerre-se-precise-chaque-jour/
Assange
Dès qu’il est question d’hommes, il est question d’Assange ET de Manning, quoi qu’on en dise et quoique le pauvre grand Brad-Cheslea en dise lui-même (en écriture inclusive « lui-elle-même » ou « elle-lui-même »).
Julian Assange n’aura jamais un procès équitable aux États-Unis
John KIRIAKOU – L.G.S. – 19 décembre 2018 !
Le 16 novembre [2018], un assistant du procureur général adjoint du district fédéral Est de Virginie a accidentellement révélé que Julian Assange, cofondateur de Wikileaks, a été accusé de crimes fédéraux non spécifiés ; ces accusations ont été scellées.
La divulgation a eu lieu dans une affaire, sans rapport, de terrorisme et de pornographie juvénile. En réponse à une demande des médias, le procureur adjoint des États-Unis a demandé à un juge de maintenir les accusations d’Assange sous scellés, en disant :
« En raison de la sophistication de l’accusé et de la publicité entourant l’affaire, aucune autre procédure n’est susceptible de garder confidentiel le fait qu’Assange a été accusé…. Les accusations doivent rester scellées jusqu’à l’arrestation d’Assange ».
Il y a plusieurs aspects alarmants à cet « accident ». Tout d’abord, c’est une nouvelle qu’Assange a été accusé de quelque chose. La spéculation est que l’accusation comporterait plusieurs chefs d’accusation d’espionnage. Le gouvernement soutiendra qu’Assange n’est pas un journaliste et qu’il n’a pas droit aux protections dont bénéficient les journalistes. Il soutiendra en outre qu’Assange a fait exactement ce que la loi de 1917 sur l’espionnage décrit comme de l’espionnage : « Fournir des informations de défense nationale à toute personne non autorisée à les recevoir. » (J’ai soutenu au fil des ans que la Loi sur l’espionnage est si vague qu’elle est inconstitutionnelle, bien qu’elle n’ait pas été contestée par le système fédéral devant la Cour Suprême).
Le problème ici est qu’il est très inhabituel – sans précédent, même – qu’un ressortissant étranger (Assange est australien) soit accusé d’espionnage alors qu’il n’a pas volé l’information. On lui a simplement fourni l’information, qu’il a ensuite rendue publique. Assange dit qu’il n’était qu’un journaliste faisant son travail et qu’aucune administration n’a jamais accusé un journaliste d’espionnage pour avoir fait son travail.
Deuxièmement, cette révélation par inadvertance a confirmé qu’Assange a été inculpé dans le district Est de la Virginie – ce qu’on appelle le « tribunal de l’espionnage ». C’est exactement ce que beaucoup d’entre nous craignaient. Rappelez-vous qu’aucun défenseur de la sécurité nationale n’a jamais été déclaré non coupable dans le district Est de la Virginie. Le district Est est également connu sous le nom de « tribunal fusée » en raison de la rapidité avec laquelle les affaires sont entendues et tranchées. Vous n’êtes pas prêt à vous défendre ? Vous avez besoin de plus de temps ? Votre dossier est incomplet ? Pas de chance. Rendez-vous au tribunal.
Source : https://www.legrandsoir.info/julian-assange-n-aura-jamais-un-proces-equitable-aux-etats-unis.html
Manning
« Je ne coopérerai pas avec ce grand jury, je ne trahirai pas mes principes » [Vidéo]
Brad-Chelsea Manning – L.G.S. – 11.5.2019
Premier message de Chelsea Manning après sa sortie de prison. Elle annonce qu’elle ne témoignera pas si elle est de nouveau convoquée devant un grand jury dans l’affaire Julian Assange. Elle est appelée à témoigner jeudi prochain, elle risque donc de retourner en prison, accusée d’outrage au tribunal.
Déclaration
Traduction de Luis Alberto Reygada pour Le Grand Soir :
« Il y a deux mois, le gouvernement fédéral m’a convoqué devant un grand jury fédéral dans le district est de Virginie. En règle générale, je m’oppose aux grands jurys. Les procureurs dirigent les grands jurys à huis clos et en secret, sans la présence d’un juge. Par conséquent, j’ai refusé de coopérer ou de répondre à toute question. En raison de mon refus de répondre aux questions, le juge [Claude] Hilton de la Cour de district a ordonné de me maintenir en détention pour outrage au tribunal jusqu’à la fin de la séance du grand jury. Hier, le grand jury s’est terminé et j’ai quitté le centre de détention d’Alexandrie. J’ai reçu de très nombreuses preuves de solidarité et de soutien amour tout au long de cette épreuve. J’ai reçu des milliers de lettres, dont des douzaines ou des centaines par jour. Cela signifie beaucoup pour moi et me permet d’aller de l’avant. Les prisons sont une tache sombre au sein de notre société, avec plus de personnes confinées aux États-Unis que partout ailleurs dans le monde. (…)
Polounine
Danseur-étoile et hétéro ? Gare à ses miches !
Les Grosses Orchades – 19 mai 2019
Et si, en plus, il se fait tatouer Poutine sur le torse, son compte est bon…
Si vous n’êtes pas au courant, on vous briefe :
Sergueï Vladimirovitch Polounine est un danseur-étoile né à Kherson, en Ukraine, le 20 novembre 1989, qui mesure 1,80 m, ce qui est rare pour un danseur, et qui possède trois passeports : un russe, un ukrainien et un serbe.
Il a commencé à faire des entrechats quand il avait 3 ans et s’en est allé « apprendre » à Londres quand il en avait 13. C’est un enfant-prodige de la danse. Il a été à 23 ans (2012), le plus jeune danseur-étoile du Royal Ballet de Grande Bretagne. De la lignée des Lifar, des Noureev, des Barychnikov…
Et puis quoi ?
Et puis, un jour, il en a eu marre. Il a décidé de tout arrêter, de tourner un clip-vidéo d’adieu et de partir « étudier l’art dramatique » à Hollywood. Cela a donné « Take me to Church », de Hozier, qui a été regardé plus de seize millions de fois sur Internet. Steven Cantor lui a, pour sa part, consacré un film documentaire : « Dancer » (non distribué en France).
Mais pourquoi avait-il voulu tout plaquer ?
« En tant qu’artiste il faut créer. Parfois dans les grands corps de ballet vous faites toujours la même chose. C’est important d’explorer. Les artistes sont aussi importants que le sujet, que les costumes, que les décors et que les chorégraphes. C’est la raison pour laquelle je suis là pour dire : “Les danseurs ne vous laissez pas faire. Résistez !” »
Cependant, le charme de Hollywood n’a pas joué et Sergueï Vladimirovitch est revenu à ses premières amours. Mais pas à Londres. Il faut dire qu’en vrai fils de son siècle, il s’exprime sur Twitter et sur Instagram, pour y dire des choses qui ne sont pas bien accueillies partout. Par exemple, que dans Roméo et Juliette, il n’y a pas besoin de deux Juliettes – une seule suffit – et que la beauté de l’histoire, c’est justement qu’il y ait un Roméo. Alors, pourquoi diable deux Juliettes ? Et il ne se contente pas d’expliquer ses points de vues dans des interviews, il les développe sur les réseaux sociaux. On dira que des hommes d’État le font aussi, et même à tire larigot, mais ceux-là ont du pouvoir. Quand on n’en a pas, la société a tôt fait de vous signifier qu’elle n’aime pas qu’on la remonte à contre-courant.
C’est pourquoi le 15 janvier de cette année, Sergueï Polounine, a vu son invitation à venir danser Le lac des Cygnes à l’Opéra de Paris lui être retirée par Mme Aurélie Dupont, officiellement pour « des propos homophobes et grossophobes » publiés sur Instagram. (Heureusement pour Donald Trump que son sort ne dépend pas de Mme Aurélie Dupont.)
Bref, les Parisiens ne verront pas Sergueï Polounine comme l’ont vu, par exemple, ici, les Londoniens (on ne dira pas ce qu’on pense des costumiers du Royal Ballet, ce n’est pas le sujet de notre post.).
Le Prince Siegfried, dans le Lac des Cygnes
avec Natalia Somova
Le Guardian, qu’on ne présente plus, est même allé jusqu’à parler, à son propos, de « suicide social ». Il faut dire que, non content de semer le désarroi dans la basse-cour de Bastille, l’énergumène s’est fait tatouer le portrait de Vladimir Poutine au-dessus de ses autres (nombreux) tatouages. Et ne déclare-t-il pas, en plus, à qui veut l’entendre que : « La Russie et l’Ukraine seront toujours ensemble quelles que soient les difficultés » ? Si ce n’est pas du suicide social au pays de dame May et des Skripal, qu’est-ce que c’est ?
Eh bien, en France aussi… Car à Paris, « si la qualité artistique du danseur est reconnue, ses propos (seulement ceux sur les homos et les gros ?) sont, eux, jugés incompatibles avec “les valeurs” d’Aurélie Dupont. Et donc du Ballet qu’elle dirige » commente sceneweb.fr
Soit dit en passant, on croyait que Malraux avait mis fin à la dictature de la Confrérie des sœurs de Notre-Dame qui régnait en son temps sur le répertoire comique, en obligeant le Théâtre Français à monter aussi des tragédies (même si le pauvre Jean Marais s’est vu traiter comme du pus par ses pairs pour avoir osé y faire ses débuts dans Britannicus). Mais c’était le théâtre, pas le ballet. Et voilà qu’un paysan du Danube de la Mer Noire vient mettre ses (beaux) pieds dans le plat en fustigeant, en plus des pédés, « les gros », alors que les deux tiers de nos suzerains américains sont obèses ! On comprend que le sang de Mme Aurélie Dupont n’ait fait qu’un tour.
Que voulez-vous, Sergueï Polounine n’a pas étudié les finesses du Parfait Courtisan ni suffisamment potassé les Bonnes manières de la baronne de Rothschild, et Mme Dupont n’a, de son côté, jamais lu Baudelaire, qui, quand même, il y a quelque 170 ans, a traité les mendiants exactement comme Sergueï traite aujourd’hui les gros. On peut être ex-danseuse de l’Opéra et ne pas connaître ses classiques. Dira-t-on jamais assez les ravages que peut causer l’illettrisme ?
Quoi qu’il en soit, qu’on se rassure, les Allemands sont moins faciles à effaroucher, les Italiens aussi, et Sergueï s’est vu inviter à Milan avant d’entamer une tournée qui l’a conduit de Saint-Pétersbourg à Moscou.
Dans les coulisses de la tournée russe
Après quoi : Sébastopol.
Pour les amateurs de danse moderne expérimentale, une petite fantaisie de 2016 :
« Run, Mary, run ! »
avec Natalia Osipova
Qu’on ne croie pas qu’il n’y en a ici que pour les Russes et les Ukrainiens… En Italie aussi, il y a des hommes dignes de ce nom. En l’occurrence, il y avait, car les deux grands artistes que voici ne sont plus parmi nous qu’en chansons. Donc surtout pour les italophones, les nostalgiques et les mélomanes.
Fabrizio de André
Gênes 1940 – Milan 1999
Fabrizio de André fut un vrai poète et un très grand interprète, également compositeur. Anarchiste dans l’âme, il a chanté les vulnérables, les rebelles, ceux que la société méprise mais qui pensent tout seuls, les exclus, les pas de chance, les prisonniers… IL a chanté contre les guerres et contre le massacre des Indiens d’Amérique (Fiume Sand Creek). Il a chanté en italien mais aussi en gênois, en napolitain et dans les dialectes d’autres régions d’Italie, en même temps qu’il traduisait des auteurs étrangers d’origines très diverses, avec un attachement particulier pour Brassens, qu’il considérait comme son maître. Sa palette de sons, de mots et d’histoires est remarquablement étendue et l’aurait été plus encore s’il n’était mort, inopinément, à 59 ans, c’est-à-dire bien trop tôt.
Les Italiens se reconnaissent tellement en lui qu’on peut dire qu’il fut un chanteur national. Ses textes, d’ailleurs, sont aujourd’hui dans les manuels scolaires.
Choisir deux ou trois titres dans quarante ans de production et treize albums était une entreprise beaucoup trop ardue pour nos faibles lumières. Nous avons joué aux sors virgilianes :
Bocca di rosa.
On l’appelait Bouche de Rose
Elle mettait l’amour, elle mettait l’amour
On l’appelait Bouche de Rose
Elle mettait l’amour au-dessus de tout.
A peine sortie de la gare
Dans le petit village de Sant’Ilario
Tout le monde vit au premier regard
Qu’il ne s’agissait pas d’un missionnaire.
Il y en a qui font l’amour par ennui
D’autres par profession
Pour Bouche de Rose, ni l’un ni l’autre
Elle le faisait par passion.
Mais la passion souvent conduit
À satisfaire ses envies
Sans chercher à savoir si le convoité
A le coeur libre ou s’il est marié.
Et ce fut ainsi que d’un jour à l’autre
Bouche de Rose s’attira
La colère des petites chiennes
Auxquelles elle avait pris leur os.
Mais les commères d’un petit village
Ne brillent pas par leurs initiatives
Les représailles à ce stade
Se limitaient aux invectives.
On sait que les gens donnent de bons conseils
En se prenant pour Jésus au temple,
On sait que les gens donnent de bons conseils
Quand ils ne peuvent plus donner le mauvais exemple.
Ainsi une vieille jamais mariée
Sans enfant, et sans plus d’envies,
Prit la peine et en fut ravie
De prodiguer ses bons conseils
Elle s’adressa aux cocues
Les apostropha d’un discours pointu :
« Le vol d’amour sera puni-
Dit-elle – par l’ordre établi »
Elles s’en allèrent chez le commissaire
Et lui dirent sans paraphraser :
« Cette dégoûtante a trop de clients,
Une vraie coopérative alimentaire ».
Et s’en vinrent quatre gendarmes,
Avec leurs plumets, avec leurs plumets
Avec leurs plumets et leurs armes.
Souvent les flics et les carabiniers
Esquivent leurs devoirs
Mais pas quand ils sont en grand uniforme
Ils la mirent dans le premier train
Tous étaient à la gare
Du commissaire au sacristain
Tous étaient à la gare
Larme à l’œil, chapeau à la main.
Pour saluer celle qui pour rien,
Sans prétention, sans prétention,
Pour saluer celle qui, pour rien
Avait apporté l’amour au pays.
Il y avait même une pancarte jaune
Écrite en caractères noirs
Qui disait « Adieu Bouche de Rose
Avec toi s’en va le printemps ».
Mais une nouvelle un peu originale
N’a pas besoin d’être dans le journal
Comme la flèche que tire l’arc
Elle vole de bouche en bouche.
À chaque nouvelle gare
Il y avait plus de monde qu’au départ
Ceux qui voulaient un baiser, ceux qui lui jetaient des fleurs
Ceux qui s’inscrivaient pour deux heures.
Jusqu’au curé qui, entre un miséréré
Et une extrême-onction, ne dédaigne pas
Le bien éphémère de la beauté
Il la voulut dans sa procession.
Ainsi, avec la Vierge en tête
Et Bouche de Rose pas loin derrière,
On vit se promener dans le pays
L’amour sacré et l’amour profane !
Il testamento di Tito
« Tu n’adoreras pas d’autre Dieu que moi »,
m’a souvent fait penser :
à ces gens différents venus de l’Est qui
disaient qu’au fond ça leur était égal.
Ils avaient un dieu différent de toi
et ils ne m’ont pas fait de mal.
Ils avaient un dieu différent de toi
et ils ne m’ont pas fait de mal.
« Tu ne prononceras pas en vain le nom de Dieu »,
Avec un couteau planté dans les côtes
j’ai crié ma douleur et son nom :
mais peut-être était-il trop fatigué ou trop occupé,
et il n’a pas entendu ma souffrance.
Mais peut-être était-il trop fatigué ou trop éloigné,
Et moi je l’ai nommé en vain.
« Tu honoreras tes père et mère »
et aussi leur bâton.
Baise la main qui t’a cassé le nez
parce que tu demandais un bout de pain.
Quand le coeur de mon père a cessé de battre
je n’ai pas eu de chagrin.
Quand le coeur de mon père a cessé de battre
je n’ai pas eu de chagrin.
« Les fêtes tu célébreras ».
Facile pour nous autres voleurs
d’entrer dans le temple résonnant des psaumes
des esclaves et de leurs patrons
sans finir ligotés aux autels
égorgés comme des animaux.
Sans finir ligotés aux autels
égorgés comme des animaux.
Le cinquième commandement dit : « Tu ne voleras point »
et peut-être que je l’ai respecté
en vidant silencieusement les poches gonflées
de ceux qui avaient déjà volé :
mais moi, sans lois, j’ai volé en mon nom,
ces autres-là l’ont fait au nom de Dieu.
Mais moi, sans lois, j’ai volé en mon nom,
ces autres-là l’ont fait au nom de Dieu.
« Tu ne commettras pas d’actes impurs »
autrement dit tu n’éparpilleras pas ta semence.
Féconde une femme à chaque fois que tu l’aimes
ainsi tu seras un homme de foi :
mais les désirs passent et les enfants restent
et la faim en tue déjà tellement.
Moi, j’ai peut-être confondu le plaisir avec l’amour
mais je n’ai pas généré de souffrance.
Le septième commandement dit : « Tu ne tueras point »
si tu veux être digne du ciel.
Regardez aujourd’hui, cette loi divine,
par trois fois crucifiée sur le bois :
regardez la fin de ce Nazaréen,
qui ne fait pas mourir un voleur de moins.
Regardez la fin de ce Nazaréen,
qui ne fait pas mourir un voleur de moins.
« Tu ne feras pas de faux témoignages »
mais aide-les à tuer un homme.
Ils connaissent par coeur le droit divin,
et ils oublient toujours le pardon :
j’ai parjuré Dieu et mon honneur ;
et, non, je n’en ressens pas de douleur.
J’ai parjuré Dieu et mon honneur
Et, non, je n’en ressens pas de douleur.
« Tu ne convoiteras pas le bien d’autrui,
Tu n’en désireras pas l’épouse ».
Dites-le à ceux, demandez-le aux quelques-uns
qui ont une femme et qui possèdent quelque chose :
dans le lit des autres déjà chauffés par l’amour
je n’ai pas ressenti de douleur.
Mon désir d’hier n’est pas fini :
ce soir je vous envie la vie.
Mais maintenant que vient le soir et que
l’obscurité m’enlève la souffrance des yeux ;
que le soleil plonge derrière les dunes
pour aller violenter d’autres nuits :
moi, en voyant cet homme qui se meurt,
mère, je ressens de la douleur.
Dans la pitié sans rancoeur,
mère, j’ai appris l’amour.
Non, ce ne sont pas des Irlandais : les Italiens aussi jouent du tin whistle !
Volta la carta
Il y a une femme qui sème du blé
Retourne la carte, on voit le paysan,
Le paysan qui pioche la terre.
Retourne la carte, arrive la guerre.
Pour la guerre, des soldats, il n’y en a plus ;
Ils se sont tous enfuis sur leurs pieds nus.
Angiolina marche, marche
Sur ses petits souliers bleus.
Le carabinier l’a séduite,
Retourne la carte, il n’y est plus.
Le carabinier l’a séduite.
Retourne la carte, il n’y est plus.
Il y a un enfant qui grimpe sur une grille,
Qui vole des cerises et des plumes d’oiseaux,
lance des pierres, et n’a pas mal.
Retourne la carte : c’est le valet de cœur.
Le valet de cœur, qui est un feu de paille.
Retourne la carte, le coq te réveille.
Angiolina, à six heures du matin
Se tresse les cheveux avec des feuilles d’ortie.
Elle a un collier de noyaux de pêches
Qu’elle fait tourner trois fois dans ses doigts.
Elle a un collier de noyaux de pêches
Qu’elle tourne trois fois autour de ses doigts.
Ma mère a un moulin et un fils infidèle.
Elle lui sucre le nez de tarte aux pommes.
Ma mère et le moulin sont nés en riant.
Retourne la carte, un pilote blond
Un pilote blond, chemise de soie,
Chapeau en renard, sourire d’athlète.
Angiolina, assise dans la cuisine,
Qui pleure en mangeant une salade de mûres.
Garçon étranger a un disque d’orchestre
Qui tourne, qui tourne, et parle d’amour
Garçon étranger a un disque d’orchestre
Qui tourne, qui tourne, et parle d’amour.
Madamadorée a perdu six filles
Entre les bars du port et ses merveilles.
Madamadorée sent le pipi de chat.
Retourne la carte et paie le rachat.
Paie le rachat avec des poches sous les yeux
Pleines de photos de rêves brisés.
Angiolina découpe des journaux,
S’habille en mariée, chante victoire.
Elle appelle les souvenirs par leur nom.
Retourne la carte et ça finit bien.
Elle appelle les souvenirs par leur nom.
Retourne la carte et ça finit bien.
Mais il a aussi chanté des auteurs français : Brassens, on l’a dit : Mourir pour des idées par exemple, et Villon, ce qu’aucun chanteur national n’a fait à moins qu’on se trompe.
Ballata degli impiccati
François Villon
« Frères humains qui après nous vivez… »
Lucio Dalla
Bologne 1943 – Montreux 2012
Lucio Dalla est né à Bologne, d’un père directeur de club de ball-trap et d’une mère couturière à domicile. Musicien (il jouait du piano et de la clarinette), il est aussi devenu, outre compositeur, interprète de ses chansons, souvent de véritables poèmes, comme chez Fabrizio de André, mais à la fois drôles et inquiétants. On ne sait pas de quoi ils sont faits : le langage est de tous les jours, et pourtant, c’est autre chose.
Lucio Dalla a chanté en solo, il a composé des musiques pour le cinéma, créé des émissions de télévision, ses tournées ont fait salles combles partout et, un beau jour, l’université de Bologne lui a conféré le titre de docteur honoris causa pour sa contribution « aux arts, à la musique et au spectacle ». Lui aussi est aujourd’hui dans les manuels scolaires.
Telefonami tra ventanni
Téléphone-moi dans vingt ans,
Moi, aujourd’hui, je ne sais pas quoi te dire,
Mon amour je ne sais pas quoi te répondre
Et je n’ai pas envie de te comprendre.
Plutôt, pense à moi, pense à moi dans vingt ans.
Moi, avec la barbe plus blanche
Et une valise à la main
Avec une bicyclette de course
Et des lunettes de soleil
Arrêté dans n’importe quel endroit du monde
Qui sait où
Parmi des milliards et des milliards de gens
La bouche ouverte et médusé
De voir une mongolfière
Qui s’élève tout doucement
Et efface de la mémoire
Tout le passé
Même les lignes de la main
Tandis que d’en haut
Comme un son qui se prolonge
La pensée qui, à peine née,
S’approche de moi, descend.
Ah, je serais un salaud
Un qui regarde trop la télévision ;
Ben, quelquefois je l’ai été.
Il est important d’avoir bien en main la situation
Ne t’en fais pas.
Du temps pour changer, on en a.
Re-pense à moi dans vingt ans, re-pense à moi
Habillé en torero
Une tartelette à la main
L’oreille dressée vers le ciel
Vers ce son lointain, lointain.
Mais voici qu’il s’approche
Un petit saut et nous sommes en deux mille,
Aux portes de l’univers.
Il est important de ne pas y arriver en faisant la queue
Mais tous de façons différentes,
Chacun avec ses moyens,
Peut-être aussi en morceaux,
Sur une vieille bicyclette de course,
Avec des lunettes de soleil,
Le cœur dans le sac.
Apprends le numéro par cœur,
Puis écris-le sur ta peau.
Si tu téléphones dans vingt ans
Jette les numéros aux étoiles.
Aux portes de l’univers,
Un téléphone sonne tous les soirs
Sous le ciel criblé d’étoiles
D’un printemps inquiétant
Disperato, erotico, stomp …
Ce « stomp » des années 70 a fait beaucoup de bruit en son temps. Surtout venant d’un auteur connu pour ses textes d’opposition très dure à la guerre et ses populaires chansons d’amour. On peut même dire que l’errance du Bolognais qui avait cru que la révolution sexuelle allait le concerner quand même un peu lui aussi, pour découvrir que non, après tout, et qu’il allait rester sur le bord de la route avec tant d’autres, a fait scandale . Mais, à la vitesse de l’éclair, son piétinement érotico-désespéré est devenu le fétiche d’une génération. Tous les lycéens en ont su les mots par cœur et se les récitaient dans les autobus au grand agacement des gens convenables.
Aucune traduction ne peut rendre justice au charme, à la dérision et à la profondeur de ce désespoir. Ah, ce « Thaïlandaise » à la fois si drôle et si déchirant ! Shakespeare a peut-être fait plus, mais pas mieux.
Ils t’ont vue boire à une fontaine
Qui n’était pas moi.
Alors qu’avec moi tu ne te déshabillais
Pas même la nuit,
Et c’étaient des bagarres, Dieu, quelles bagarres,
Ils t’ont vue soulever ta jupe,
Jusqu’aux poils, noirs.
Puis tu m’as dit : « Pauvre type
Ton sexe, porte-le aux cabinets ».
Tu t’es tirée avec ton amie.
La grande, celle à la grande chatte,
Pour faire toutes les deux quelque chose d’important,
D’unique et de grand.
Moi, je reste à la maison, je sors peu.
Je pense, seul, en caleçon.
Je pense à des déceptions, à de grandes entreprises,
À une Thaïlandaise.
Mais l’entreprise exceptionnelle, crois-moi,
C’est d’être normal.
Et, donc, normalement,
Je suis sorti au bout d’une semaine.
Il ne faisait pas si froid que ça, et, normalement,
J’ai rencontré une putain.
À part les cheveux, la robe,
La fourrure et les bottes,
Elle avait aussi des problèmes sérieux
Et ne raisonnait pas mal.
Je ne sais pas si tu vois,
Une putain optimiste et de gauche.
Nous n’avons rien fait.
Je suis resté seul.
Seul comme un crétin.
En tournaillant encore un peu, j’ai rencontré
Un qui s’était perdu.
Je lui ai dit que dans le centre de Bologne
Même un bébé ne se perd pas.
Il m’a regardé d’un air un peu égaré,
Et il m’a dit « Je suis de Berlin ».
Berlin, j’y suis allé avec Bonetti,
C’était un peu triste et très grand,
Alors, je me suis cassé,
Je rentre à la maison et je me remets en caleçon.
Avant de grimper les escaliers, je me suis arrêté
Pour regarder une étoile.
Je suis un peu préoccupé,
Le silence enflait dans ma tête,
J’ai grimpé les escaliers trois par trois,
Je me suis étendu dans le divan,
Et ma main est partie toute seule, doucement.
Traductions (indigentes !) : c.l. pour Les Grosses Orchades
Et les machos ?
Il y en a, et certains d’entre eux sont en train de passer de sales quarts d’heures. Mais nous, on n’en connaît pas. Ajoutez-les si vous voulez.
Mis en ligne le 19 mai 2019
One Responses
Magnifiques poèmes !
Notre époque, corsetée par les algorithmes, serait-elle nostalgique du « bateau ivre » ?
Moralité : si on veut aller de l’avant, il fait faire un trait sur le XXe siècle.