De la normalisation par la religion aux campagnes de boycott, quel avenir pour la cause palestinienne ?
Gilles Munier – France-Irak-Actualités – 6 .6.2020
Par Antoine Charpentier (revue de presse : alahed news – juin 2020)*
Multiples sont de nos jours les voies de la « normalisation » arabe et occidentale avec l’Entité d’Israël, au détriment de la cause palestinienne. L’objectif principal de cette normalisation est de faire oublier les droits et les situations tragiques que vit au quotidien le peuple palestinien depuis plusieurs décennies. La normalisation par la religion qu’elle soit chrétienne ou musulmane, devient en quelque sorte un fait accompli pratiqué sous l’étiquette de la visite des lieux saints, justifiée par une interprétation théologique bancale et un sens ambigu du travail pastoral.
Face à la normalisation par la religion interviennent des mouvements de boycott qui se multiplient et prennent de plus en plus d’ampleur depuis 2005. Les mouvements de boycott mobilisent de nombreuses organisations religieuses arabes et occidentales, et même quelques pays et gouvernements à travers le monde.
Les chrétiens dans le monde, notamment au Moyen-Orient souffrent de divisions au sujet de la cause palestinienne. Toutefois, nombreuses sont les démarches, les projets et les activités des Églises palestiniennes contre l’occupation israélienne, et les démarches de normalisation par la religion. Il convient de préciser qu’en 2009 les chefs religieux chrétiens en Palestine ont organisé un sit-in au nom de la justice en Palestine et qu’en 2018 environ 300 représentants des Églises chrétiennes palestiniennes se sont réunis en un second sit-in pour le droit et la justice en Palestine.
Quant au Vatican, il n’a reconnu l’État de Palestine que le 13 mai 2015, ce qui arrive trop tard, compte tenu surtout de la reconnaissance par le Vatican de l’«-l’« État » d’Israël le 30 décembre 1993. Le Vatican continue d’adopter un ton très diplomatique et complaisant au sujet de la cause palestinienne et du conflit israélo-arabe. Si le positionnement du Vatican est quelque peu compréhensible, il demeure similaire à celui de nombreux pays occidentaux.
Les positions du Vatican sont claires, elles mettent, de prime abord, l’accent sur le dialogue entre Palestiniens et Israéliens. Cependant, tout le monde sait – le Vatican y compris – « qui » rejette le dialogue, « qui » pratique l’occupation, emploie les méthodes de siège, de blocus, de répression, de discrimination à l’encontre des Palestiniens, ainsi que la destruction de leurs maisons. Nous ne pouvons peut-être pas blâmer le Vatican d’avoir opté pour une position aussi diplomatique, mais il y a certaines choses que la théorie chrétienne peut difficilement ignorer, notamment lorsqu’il s’agit du passage de l’évangile de Saint Mathieu chapitre 25, verset 35 à 45. Les positions du Vatican au sujet de la Palestine lui ont valu, à plusieurs reprises, des critiques sévères de la part des chefs des Églises palestiniennes. Il est clair que le Vatican, par sa démarche, manque au principe de la subsidiarité, cher à l’enseignement social de l’Église catholique.
Les positions des Églises orientales varient au sujet de la Palestine. Après les positions du pape copte Shenouda appelant au boycott et à la cessation des pèlerinages chrétiens en Terre Sainte, intervient la position plus complaisante de son successeur le pape Théodore, qui s’est traduite par une visite à Al-Qods occupée en 2015.
L’actuel patriarche maronite Bishara al-Ra’i a également visité Al-Qods en 2014 sous prétexte d’accompagner le Pape François dans sa visite, mais il convient de noter que cela n’était pas nécessaire, ni exigé par le pape. Le Patriarche maronite a justifié sa visite en « Israël » par son devoir pastoral.
Mais, par ailleurs, le Congrès des Églises orientales soutient entièrement la cause palestinienne, le droit des Palestiniens d’avoir leur État propre et de vivre librement dans la dignité. Le Congrès a mis l’accent, lors de sa dernière réunion en 2018 à Bagdad, sur le droit au retour des réfugiés.
Le contraste entre les Églises orientales et occidentales est bien visible et réel. Il est également visible au niveau des gouvernements, de certains clercs et des peuples arabes. Ces derniers demeurent majoritairement ralliés à la cause palestinienne. L’un des principaux objectifs de la mission des Églises est d’écouter le peuple de Dieu.
En ce temps de « normalisation » les pèlerinages religieux se multiplient.
Selon le rapport officiel du ministère israélien du Tourisme, cité par le site Aleteia, le nombre de pèlerins chrétiens en Terre Sainte a augmenté de 10,6% en 2019. Le nombre total des pèlerins chrétiens a avoisiné les 4,6 millions de personnes, sans compter les pèlerins d’autres religions. Nul n’exige des Églises d’arrêter leurs visites en Terre Sainte, mais ne serait-ce pas une carte à jouer que celle de la pression diplomatique, dans le but de ramener le gouvernement israélien à la table des négociations, en vue d’alléger le poids de l’injustice contre le peuple palestinien, en essayant de trouver une solution fiable, durable et économique ?
Nombreux sont les individus qui voient dans les pèlerinages en Terre Sainte une façon de soutenir les chrétiens d’Al-Qods. Cependant, plusieurs questions se posent à propos de cette démarche : quel est l’avantage et le bénéfice moral et matériel de ces pèlerinages sur les Palestiniens de Jérusalem, en particulier les chrétiens ? Quel sort pour les centaines de chrétiens présents à Gaza, peut-on savoir qui va à leur rencontre, qui les soutient et comment ? Quelles sont les vraies cartes entre les mains de la diplomatie, qui permettraient d’œuvrer sérieusement à une solution véritablement durable et équitable au conflit israélo-palestinien ?
Enfin, il serait également utile de se poser la question des raisons qui ont mené au déclin de la présence chrétienne en Palestine, berceau du christianisme, laquelle est passée d’environ 35% en 1948 à environ 2% aujourd’hui.
Source d’origine : alahednews.com
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Juin 2020
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