L’Empire du Chaos passe à la vitesse supérieure dans sa guerre contre les BRICS

 

 

Pepe Escobar – The Unz Review – 24.6.2025

Traduction : c.l. pour L.G.O.

 

 

 

 

 

 

Ils sont venus. Ils ont « défoncé les bunkers ». Ils se sont enfuis.

Ils ont ensuite préparé la scène pour contrôler la pièce grâce à une vaste opération de PR [Relations Publiques ou Propagande, au choix, NdT].).

POTUS [le président US]  a salué la victoire « spectaculaire » des B-2 qui ont volé des USA en Asie occidentale pour larguer des MOP (« Massive Ordnance Penetrators ») sur Fordow au milieu de la nuit du 22 juin (il est significatif que ce soit la même date que le début de l’opération Barbarossa en 1941).

Les fonctionnaires de Trump bis se sont réjouis de ce que le programme nucléaire iranien ait désormais disparu.

C’était la réalité des émissions de téléréalité. Dans la réalité, Mannan Raisi, membre du Majlis (Parlement) iranien originaire de la ville sainte de Qom, a résumé la situation en ces termes : « Contrairement aux déclarations du menteur président US, les installations nucléaires de Fordow n’ont pas subi de dommages importants. Seules les structures en surface, qui peuvent être restaurées, ont été détruites. De plus, tout ce qui pouvait présenter un danger pour la population avait été évacué à l’avance. Il n’y a aucun rapport faisant état d’émissions nucléaires. Les fausses affirmations de Trump concernant la « destruction de Fordow » sont réfutées par le fait que les attaques ont été si superficielles qu’il n’y a même pas eu de victimes dans l’installation. »

Ce qui compte vraiment, c’est que l’Empire du chaos, en un seul raid – spectaculairement criminel – a bousillé la charte de l’ONU (une fois de plus), le droit international (une fois de plus), le TNP (peut-être pour de bon), la constitution américaine, la « communauté internationale » et la propre base MAGA de Trump.

Le Sud global fait désormais les comptes – et tire les conclusions qui s’imposent. La « paix par la force » du POTUS est désormais à l’origine de deux guerres, d’un génocide et d’une attaque non provoquée par une superpuissance nucléaire au nom d’une puissance nucléaire contre une puissance non-nucléaire..

La réponse du CGRI ne s’est pas fait attendre : la vraie guerre commence maintenant. L’axe sioniste en paiera le prix. À la pelle.. Il ne s’agira pas d’une guerre à grande échelle contre l’Empire : c’est tout à fait anti-stratégique. Ce qui va se développer, c’est une mort en plusieurs tranches,par mille coupures.

On l’a déjàbien vu dès la matinée du 23 juin. L’Iran a lancé pas moins de cinq vagues de missiles multidirectionnels – couvrant l’ensemble d’Israël, y compris de nouvelles cibles telles que le port et la centrale électrique d’Ashdod. Le taux d’interception israélien est tombé en dessous de 50%. Tout l’’enfer s’est déchaîné : des dysfonctionnements de sirènes d’alerte aux pannes d’électricité. Les membres de la Knesset ont commencé à s’enfuir. Un vol de sauvetage d’El Al en provenance de New York a dû faire demi-tour en plein vol quand les missiles se sont mis à lui couper la router.

Le message : l’ensemble d’Israël est désormais une cible légitime, accessible en quelques minutes par les missiles Kheybar-Shakan, Emad, Qadr et Fattah-1.

 

Le détroit d’Ormuz : carte ultime

Les priorités de l’Iran, revues à la hausse, sont les suivantes : arrêt de la guerre faite à Gaza et au Sud-Liban ; « évolution » de la doctrine nucléaire (tous les paris sont ouverts) ; assassinats ciblés de dirigeants sionistes ; nouvelles frappes sur le Mossad ; nouveaux barrages de missiles sur Tel-Aviv, Haïfa et Dimona.

Il n’y aura pas de guerre directe contre l’Empire du Chaos. Le blocus du détroit d’Ormuz est l’ultime carte iranienne, non la carte nucléaire : elle ne sera pas jouée dans son intégralité pour l’instant. Au mieux, il pourrait y avoir un blocus partiel du transport de pétrole vers l’Occident collectif… fragmenté.

Une ancienne source haut placée de l’État profond a confirmé que « la CIA a informé l’administration Trump que la Chine était résolument opposée à la fermeture du détroit d’Ormuz, et Trump a donc procédé au bombardement ».

La fermeture du détroit d’Ormuz déclenchera une dépression mondiale d’une ampleur jamais vue. La perte de plus de 20% de l’approvisionnement mondial en pétrole déclenchera l’implosion de plus de deux quadrillions de dollars de produits dérivés, comme le prévoyaient déjà les projections de Goldman Sachs à la fin des années 2010. Warren Buffett l’a décrit comme une réaction en chaîne après une explosion nucléaire.

En l’état actuel des choses, Téhéran a appris une leçon de la manière la plus dure. Ce n’est pas que les dirigeants iraniens se soient comportés de manière immorale : au contraire, leur foi dans la diplomatie et les négociations sérieuses s’est révélée en totale contradiction avec le modus operandi tirrémédiablement vil de l’empire US.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a parfaitement résumé la situation : L’Iran négociait avec les USA « quand Israël a décidé de faire exploser cette diplomatie ». Ensuite, l’Iran discutait « avec les E3/UE quand les USA ont décidé de faire exploser cette diplomatie-là ». Ergo, il est absurde d’ordonner à l’Iran de « revenir » à la table des négociations : « Comment l’Iran peut-il revenir à quelque chose qu’il n’a jamais quitté et encore moins fait exploser ? »

Au Forum de Saint-Pétersbourg, le président Poutine a été très clair : « Nous soutenons l’Iran et la lutte pour ses intérêts légitimes, y compris l’utilisation pacifique de l’énergie atomique ». Il a ajouté, de manière décisive que :  « Ceux qui disent que la Russie n’est pas un partenaire fiable sont des provocateurs.

Poutine lui-même a dit en début de semaine que la Russie avait déjà proposé de renforcer les défenses aériennes de l’Iran, mais que cette offre n’avait pas été suivie d’effet. Ce n’est pas un secret non plus que, contrairement au traité avec la Corée du Nord, l’accord de partenariat stratégique entre la Russie et l’Iran ne comportait pas de disposition relative à la sécurité collective.

Cette situation est peut-être sur le point de changer.

Il n’y a pas encore eu de fuites substantielles sur la rencontre Poutine-Araghchi, mais des questions extrêmement délicates ont dû être abordées. Poutine a réaffirmé que « l’agression absolument non provoquée contre l’Iran n’a aucun fondement ni aucune justification », pour ensuite ajouter, de manière énigmatique : « La Russie prend des mesures pour soutenir le peuple iranien ».

Aujourd’hui, Poutine rencontre le ministre iranien des Affaires étrangères, Araghchi, à Moscou.

Personne ne devrait être surpris si l’Iran décide qu’il doit désormais posséder une arme nucléaire pour dissuader l’axe sioniste. L’une des options évoquées par certains analystes – bien qu’extrêmement délicate à plusieurs niveaux – serait un partenariat de sécurité complet avec la Russie et peut-être la Chine, l’Iran étant placé sous leur parapluie nucléaire.

Ce nouvel accord maintiendrait au moins l’enrichissement nucléaire iranien en tant que processus civil, scientifique et non militaire, permettant au partenariat stratégique Russie-Chine de superviser l’enrichissement de l’uranium tout en fournissant des garanties de sécurité à l’Iran.

En outre, cela constituerait une garantie de sécurité pour le Corridor de Transport International Nord-Ssud (INSTC), ce qui est dans l’intérêt stratégique national de la Russie.

Le point de vue chinois est lui aussi très complexe. Les groupes de réflexion chinois s’accordent plus ou moins à dire que l’Iran devrait, plus que jamais, renforcer son système de défense aérienne. Cela implique probablement de donner suite à l’offre de coopération de la Russie dans ce domaine.

 

Un long nuage sombre se rapproche. 

L’entrée de Trump dans la guerre – suicidaire – des néocons israëlo-US contre l’Iran ne fait qu’ajouter une nouvelle couche au tableau d’ensemble. C’était prévisible depuis au moins la fin des années 1990 : le même scénario de contrôle des ressources énergétiques de l’Asie occidentale pour renforcer la puissance économique de l’Empire du Chaos, tout en intimidant le Sud global : « ne pensez même pas à dévier de notre ordre unilatéral ! ».

C’est le POTUS lui-même qui a dévoilé le jeu, en majuscules : « Si le régime iranien actuel n’est pas en mesure de rendre l’Iran GREAT AGAIN, pourquoi n’y aurait-il pas un changement de régime ? MIGA ! »

L’inestimable professeur Michael Hudson a, entre quelques autres, résumé les enjeux : « L’Iran n’est pas seulement la pierre angulaire du contrôle total du Proche-Orient et de ses avoirs en pétrole et en dollars. L’Iran est un maillon essentiel du programme “ Belt and Road” de la Chine, qui vise à créer une nouvelle route de la soie pour le transport ferroviaire vers l’Occident. Si les États-Unis parviennent à renverser le gouvernement iranien, cela interrompra le long corridor de transport que la Chine a déjà construit et qu’elle espère étendre plus à l’ouest. L’Iran est également un élément clé pour bloquer le commerce et le développement russes via la mer Caspienne et l’accès au sud, en contournant le canal de Suez. Et sous le contrôle des USA, un régime client iranien pourrait menacer la Russie depuis son flanc sud ».

Il n’est donc pas étonnant que le changement de régime à Téhéran – c’est l’enjeu de toute cette guerre – soit une question d’intérêt national suprême pour les classes dominantes américaines, dans le sens souligné par le professeur Hudson d’un « empire coercitif d’États clients observant l’hégémonie du dollar en adhérant au système financier international dollarisé ».

Comparez maintenant tout ce qui précède avec la teneur des discussions du Forum Économique International de Saint-Pétersbourg (SPIEF) la semaine dernière. Le forum s’est terminé dans la soirée du 20 juin. Les USA ont attaqué l’Iran au milieu de la nuit du 22 juin.

Pratiquement tous les pays du Sud global étaient présents à Saint-Pétersbourg, soit au moins 15.000 personnes. Plus d’un millier d’accords ont été signés, pour un montant de plus de 80 milliards de dollars, selon le secrétaire exécutif du comité d’organisation du SPIEF, Anton Kobakov.

Des panels éclairants ont été organisés : sur les défis de la route maritime du Nord, l’un des principaux corridors de connectivité du 21e siècle ; sur les investissements mutuels entre la Russie et la Chine ; sur la réforme du système financier international ; sur la lutte contre les « fake news » – une industrie dans laquelle l’Occident excelle – et sur l’IA qui contrôle tous les racontars ; sur les BRICS, sur l’OCS, l’EAEU, l’ASEAN, l’INSTC, l’Institut International de Recherche sur la Criminalité Transnationale (INSTC).

Lors de la session plénière, les pays du Sud global et les BRICS étaient pleinement représentés : Russie, Chine, Indonésie (le président Prabowo était l’invité d’honneur), Afrique du Sud, Bahreïn. Le président Poutine est allé droit au but : « La Russie et la Chine ne façonnent pas le nouvel ordre mondial : il se lève naturellement, comme le soleil. Nous ne faisons que préparer le terrain pour le rendre plus équilibré ».

Pourtant, un long nuage sombre sdescend sur nous tous, pendant que l’Empire du Chaos ne recule devant rien pour empêcher le lever du soleil. Le représentant de la Russie à l’ONU, Vasily Nebenzya, l’a formulé de manière aussi tranchante que le fil d’un poignard : « Les USA ont ouvert la boîte de Pandore (…) Personne ne sait quelles nouvelles catastrophes et quelles nouvelles souffrances en sortiront ».

Source : Empire of Chaos Takes War on BRICS to Next Level, by Pepe Escobar – The Unz Review

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Juin 2025

 

 

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