Les Assassins sont de retour !
Israël Adam Shamir – Entre la plume et l’enclume – 4.2.2020
Ron Unz, notre intrépide perturbateur du dogme établi, vient de publier un long essai où il fait le lien entre plusieurs de ses textes précédents, sous l’intitulé Mossad Assassinations. J’aime son style naturel, l’absence de pathos et de dramatisation, dans ce qu’il écrit. Quand on le lit, on a l’impression de bavarder avec un agréable voisin, qui gagne à être connu. Dans un biopic, c’est Henry Fonda qui devrait jouer le rôle. Pour moi, la longueur de ses essais (celui-ci fait 27.000 mots) ne constitue pas un défaut mais un avantage, et j’en fais tout de suite un résumé. Il s’agit de le suivre dans sa lecture du gros volume de Ronen Bergman Rise and Kill First (750 p.), l’ouvrage qui vient de paraître sur les assassinats par le MOSSAD, à partir d’une enquête serrée [en français, c’est chez Grasset : « Lève-toi et tue le premier », de Ronen Bergman, Johan-Frédérik Hel Guedj]. Unz a fait le tri dans cette montagne, et il est resté sur sa faim, pour une excellente raison : Bergman a volontairement soumis son étude des assassinats commis par le MOSSAD à la… censure du MOSSAD. Une telle prudence a épargné à Bergman la fureur du Kidon, comme on appelle l’unité des assassinats du Mossad, mais cela a rendu l’énorme pavé bien moins utile. Un livre sur des assassins, corrigé par un comité d’assassins, est un exercice d’hagiographie, mais non une évaluation historico-critique. Unz s’en est allé fouiller dans les lacunes du livre de Bergman, les sombres histoires où l’on n’a pas entendu aboyer les chiens, et, tel un glosateur médiéval, il a ajouté sa compréhension inestimable à un texte qui sans lui resterait fort obscur (peut-être à dessein).
Pourquoi devrions-nous nous intéresser au sujet, au fait ? Unz donne une réponse aussi courte que tranchante. Le MOSSAD a assassiné plus de gens que tous les services spéciaux des autres pays (plus que le sinistre KGB, la CIA déchaînée et le MI6 de James Bond) mis ensemble. « Le comptage de cadavres (par le MOSSAD) est supérieur au total de celui des autres grands pays du monde. Je pense que toutes les révélations scabreuses sur la CIA létale ou les complots du KGB pendant la Guerre froide que j’ai vues commentées dans les récits des journaux ne feraient guère qu’un chapitre ou deux dans le livre interminable de Bergman », écrit Ron Unz.
Ce genre de faits s’était déjà produit par le passé, il y eut les Assassins d’Alamut, qui jadis contrôlèrent le Moyen Orient. Les Assassins tiraient leur pouvoir de leur habileté et de leur disponibilité pour aller assassiner aussi bien les chefs des Croisés que les Sarrazins, ne laissant en vie que les gouvernants faibles et passifs qui obéiraient à leur commandement. En menaçant (et en tuant à l’occasion) les leaders européens et américains, les Juifs, ces nouveaux Assassins, nous ont ouvert la porte sur le monde des politiciens frileux et corrompus, qui bavent d’amour pour eux au lieu de se soucier de leurs électeurs.
Et voici qui est tout aussi important : alors que les USA régis par les WASP avaient globalement évité d’assassiner leurs opposants, avec l’ascendant juif, les tactiques du petit État d’Israël ont fini par être adoptées par le plus grand État juif, les USA. « L’administration Bush avait mené à bien 47 de ces assassinats-sous-un-autre-nom, tandis que son successeur Barack Obama en faisait abattre 542 de son propre chef, lui, l’éminent constitutionnaliste et prix Nobel de la Paix, tandis que Donald Trump a battu tous les records avec l’assassinat du général iranien. » C’est pour cette raison que cette étude sur les assassinats du MOSSAD est à lire d’urgence, et que nous devrions suivre Unz dans sa lecture critique de Bergman.
Il n’y a pratiquement pas de nouvelle révélation dans le livre de Bergman : première révélation de Ron Unz. Toutes ces histoires, tous ces détails, mais pas un seul grand cas qui n’ait été déjà connu. Les objectifs suspectés restent cachés et non mentionnés. Il aurait pu évoquer le meurtre (ou soupçonné tel) d’Arafat, exécuté à l’aide du même isotope rare qui en rejetaient avec insistance l’accusation), et un officier de l’Armée de l’air brésilien qui avait été assassiné de la même façon par le MOSSAD pour empêcher le Brésil de devenir une nation nucléarisée. Il semblerait que l’empoisonnement radioactif soit une marque de fabrique du MOSSAD. « Bergman se borne à rapporter les démentis israéliens catégoriques, puis il souligne que même s’il savait la vérité, il ne pourrait pas la publier dans la mesure où son livre a été entièrement rédigé dans le cadre du strict visa de censure israélien. »
Bergman fait de son mieux pour effacer By Way of Deception, le livre glaçant de Victor Ostrovsky, déserteur du MOSSAD qui a miraculeusement évité le Kidon pour nous raconter ses coups les plus mémorables. Le livre est à peine mentionné une fois dans une note en bas de page, tandis que son second livre, The Other Side of Deception, encore plus effrayant, n’est pas mentionné du tout, quoique ses révélations reçoivent un certain espace chez le prudent M. Bergman. « Tandis qu’Ostrovsky explique certains des succès du MOSSAD par son emploi prolifique de sayanim, c’est-à-dire de juifs locaux prêts à offrir toute aide éventuelle, qu’il s’agisse d’un toit sûr, d’une voiture, d’un prêt, d’un transfert, le terme sayan ne figure même pas dans l’index du livre de Bergman ».
Il ne mentionne pas l’assassinat très sophistiqué du président pakistanais, le général Zia ul-Hak, qui fut tué par l’injection d’un gaz létal dans la cabine d’un avion de ligne, ce qui provoqua le crash de l’avion, alors que cette technique pourrait éclaircir le mystère dans le cas de nombreuses catastrophes aériennes. Le général Zia avait créé la bombe nucléaire musulmane, chose qu’Israël voulait arrêter à tout prix.
Bergman ne parle pas du meurtre d’hommes politiques israéliens et palestiniens qu’ils considéraient trop « mous » et favorables à la paix. Aucun feu rouge ne les a arrêtés. Ils sont fortement soupçonnés d’avoir abattu Yitzhak Rabin, le premier ministre israélien relativement intéressé par la paix; ils n’ont même pas hésité à tuer le dirigeant désigné du MOSSAD, le héros de guerre Yekutiel Adam, général et chef d’état-major adjoint d’Israël, considérant qu’il ne tolèrerait pas leurs massacres gratuits. Ostrovsky parle de meurtre-déguisé-en-suicide dans le cas du magnat de la presse britannique Robert Maxwell, que Bergman ne mentionne même pas. Il avait, après bien des années passées à servir le MOSSAD, eu la témérité de lui demander un prêt.
Il apparaît que les tueurs du MOSSAD n’ont pas été arrêtés non plus par la dignité de la fonction présidentielle aux USA. Ils avaient projeté d’assassiner le président Bush Jr en 1991 lorsque celui-ci avait essayé de forcer Israël à bien se tenir (Unz a vérifié et confirmé que les Services secrets US ont effectivement reçu un avertissement de M. Ostrovsky et qu’ils l’ont pris très au sérieux). Ce projet a été éventé, mais Bush n’a pas été réélu, pas plus que le président Jimmy Carter qui était considéré comme anti-Israélien par la ligne dure des Juifs. Avant même que l’État d’Israël soit institué dans les faits, les prédécesseurs du MOSSAD avaient essayé de tuer le président Harry S. Truman. Au même moment, ils réussissaient à assassiner Lord Moyne de Grande Bretagne, de sorte que les présidents US ont eu et ont toujours de très solides raisons pour prêter une oreille favorable aux requêtes juives.
Ron Unz rentre dans le détail de l’assassinat du président Kennedy en 1963. Suivant en cela l’enquête séminale de feu Michael Collins Piper, il pense que Kennedy a été tué parce qu’il demandait à Israël de laisser entrer des inspecteurs dans le centre nucléaire de Dimona, et qu’il faisait pression pour la dénucléaristion d’Israël. Ce sujet, Unz l’avait déjà exploré auparavant, mais cette fois-ci il ajoute un détail très important. [Voir aussi, sur le même site et sur le nôtre : Est-ce Israël qui a tué les Kennedy ? NdGO]
Robert Kennedy a été assassiné alors qu’il était sur le point d’être élu président des États-Unis, pour que le meurtre de son frère ne puisse l’objet d’aucune enquête. Un jeune Palestinien appelé Sirhan Sirhan avait tiré un coup de feu sur la scène, été rapidement arrêté et condamné pour le meurtre. Certains chercheurs ont longuement défendu l’idée qu’il n’était qu’une sorte de figurant utile dans le complot, agissant peut-être sous un certain type d’hypnose ou de conditionnement. Pure imagination ? Ron Unz a remarqué un récit comparable dans le livre de Bergman : au même moment, un autre jeune Palestinien suivait des séances intensives de conditionnement hypnotique entre les mains du MOSSAD en Israël, parce qu’on le programmait pour assassiner le chef de l’OLP, Yasser Arafat.
Cela avait été décisif. Le MOSSAD en avait encore appris bien plus de son prédécesseur le Vieil Homme de la Montagne, créateur de la secte assassine. Le conditionnement hypnotique explique le mystère de l’assassinat de Robert Kennedy, et peut-être de quelques autres; Ronen Bergman n’a pas fait le lien, mais a permis à Ron Unz de le faire.
Bergman raconte une histoire terrible, où le MOSSAD a cherché à terroriser à une grande échelle :
« Une énorme vague d’attentats terroristes sous faux-drapeau avait été déclenchée en 1981 par Ariel Sharon, ministre de la Défense israélien. Sous la direction israélienne, de grandes voitures piégées se sont mises à exploser dans les quartiers palestiniens de Beyrouth et d’autres villes libanaises, tuant ou blessant de très grandes quantités de civils. Un seul attentat, en octobre, avait fait environ 400 victimes, et dès le mois de décembre, il y avait eu dix-huit explosions par mois; leur efficacité se trouvait grandement augmentée par l’usage de la très innovante technique israélienne des drones. La responsabilité officielle pour tous ces attentats, c’est une organisation libanaise curieusement inconnue jusque-là qui l’a revendiquée, mais le but était de provoquer l’OLP afin qu’elle engage une riposte contre Israël, pour justifier l’invasion planifiée par Sharon du pays voisin. Comme l’OLP refusait obstinément de mordre à l’hameçon, on mit en oeuvre le projet d’un gigantesque attentat avec des tonnes d’explosifs sur le stade de Beyrouth à l’occasion de la cérémonie politique du 1er janvier, dans l’idée de provoquer morts et destructions « dans des proportions sans précédent, même pour le Liban ».
Ce plan, c’est le Premier ministre Begin qui l’avait fait avorter. Quant à Unz, cette histoire lui a servi de déclencheur pour reconsidérer le 11 septembre. Il avait écrit sur les Tours Jumelles auparavant, en rejetant les deux versions, celle du gouvernement, avec ses 19 Arabes armés de cutters, et celle, alternative, de l’« inside job » (complot au plus haut niveau), parce que personne, dans l’administration Bush, n’aurait osé exécuter un tel projet. Maintenant, avec la nouvelle référence de Bergman, on y voit plus clair. Ariel Sharon avait été empêché par son Premier ministre de tuer une centaine de milliers de gens dans le stade de Beyrouth en 1981; mais devenu lui-même Premier ministre en 2001, rien ne pouvait l’empêcher de tuer trois mille habitants de New York. C’était risqué mais le risque a payé. En 2001, les USA étaient un Etat pacifique et prospère, talors qu’Israël était au bord de l’effondrement. Vingt ans plus tard, Israël prospère, tandis que les US sont en plein effondrement, conséquence du 11 septembre.
Cependant, ni Unz ni Bergman n’ont tenté de replacer les assassinats du MOSSAD dans la continuité de l’histoire juive. Les assassinats juifs n’ont pas commencé avec le MOSSAD , ni même avec les sionistes. Cela fait partie de l’ADN juif, au moins depuis le XIX° siècle. Une femme juive avait pris part à l’assassinat du tsar Alexandre II en 1881. Le Premier ministre russe Pierre Stolypine, celui qui avait presque réussi à éviter la Révolution, fut assassiné en 1911 par le tueur juif Dimitri Bogrov. Entre ces deux actes, des milliers d’actes terroristes ont été perpétrés, des milliers de personnages officiels ont été assassinés dans l’empire russe, et les assassins étaient dirigés par deux terroristes juifs, Grigori Gershuni et Eugene Azef.
Les sionistes, à l’époque un petit mouvement, et le parti socialiste juif, le Bund, faisaient aussi dans le terrorisme appliqué. Certains terroristes, qui participaient à des organisations non juives, finirent par choisir d’aller vers l’État juif naissant, en Palestine. Pinchas Rutenberg, terroriste et assassin, devint sioniste et un homme d’affaires très en vue; il y a implanté une compagnie électrique et il y a des rues qui portent son nom dans plusieurs villes israéliennes.
La Révolution russe ne mit pas fin au terrorisme juif : en 1919, une tentative pour assassiner Vladimir Lénine fut mise au point par Fanny Kaplan, juive. Lénine survécut mais très diminué et mourut en 1924 après une longue maladie. En 1953, Staline mourait dans des circonstances suspectes, après avoir contrarié les juifs. Et le terrorisme juif a continué à régner ailleurs; le président ukrainien en exil Simon Petlioura fut tué par un juif vengeur, de même que le diplomate allemand vom Rath.
Il y a des années, j’ai rencontré en Israël un vieux terroriste qui avait participé à bien des massacres dans la Russie prérévolutionnaire, après quoi il s’était enfui en Palestine. Il me disait : pour que le terrorisme fonctionne, il te faut de la dynamite et des journaux. La dynamite sans le soutien médiatique, ça ne marche pas, et vice-versa. Sans les médias, on crée un martyr. Sans une véritable option létale, les gens à la tête solide ne vont pas se soucier de ce que tu peux écrire.
On entend souvent dire que l’influence juive est fondée sur la finance et les médias. Ce n’est pas toute la vérité. La peur de la mort est le troisième pilier de l’ascendant juif.
Un ennemi, ça peut être traité :
(a) par les médias. Au début, ils barrent toute référence à son nom; si cela ne suffit pas, ils l’attaquent « ad hominem », non sur ses idées, mais par la diffamation.
(b) par l’argent. Henry Ford essayait de combattre l’influence juive, mais il reçut une offre qu’il ne pouvait pas refuser; il présenta ses excuses et fit brûler ses livres, et fit acte de repentance, le tout pour ne pas voir sa firme automobile mise en faillite.
(c) par l’assassinat proprement dit, pour ceux qui ne tiennent ni à l’argent ni à leur réputation.
Alors que les juifs maniaient tout cela depuis longtemps, l’État d’Israël a fait de l’assassinat une production de masse. Il y a des milliers de noms, des milliers de tués, diffamés, ruinés, partout dans le monde. Et c’est un problème inhérent à la notion d’État juif; cet État ne saurait être différent. « La tradition juive est sournoisement ethnocentrique et elle déshumanise les gens qui n’en sont pas avec un empressement unique », écrivait Ed Herman dans son Triomphe du marché.
Il est là, le problème avec « l’accord du siècle » de Trump : ce n’est pas qu’il soit injuste envers les Palestiniens (il est injuste, mais la vie aussi est injuste), c’est qu’il préserverait un État juif séparé.
Même un État juif plus petit serait le siège du MOSSAD et de son unité d’assassinats, le Kidon, pour menacer les présidents et les hommes politiques. Même un État juif réduit possèderait des armes nucléaires et tiendrait le monde en respect. Même un Etat juif plus petit serait empoisonné par son idéologie profondément enracinée et extrêmement xénophobe, et cet État resterait une source de contamination idéologique pour les descendants de juifs comme pour les non juifs.
Le vieil État assassin d’Alamut fut conquis par les Mongols et ces guerriers impitoyables chassèrent les Assassins de leurs caches dans les montagnes, et démantelèrent définitivement leurs conspirations. Leurs descendants inoffensifs sont les Ismaéliens, qui vivent paisiblement et ne troublent la paix de personne. Si nous ne parvenons pas à régler le problème, il y aura de nouveaux Mongols pour démanteler l’État d’Israël et rendre les descendants de juifs aussi inoffensifs que les Ismaéliens.
Cependant, le problème peut trouver une solution pacifique, par la fusion d’Israël et de la Palestine en un seul État démocratique, comme l’Afrique du sud a fusionné au lieu de se laisser glisser sur la pente des Bantoustans ainsi que le voudraient Trump et Kushner. Ce pays ne serait pas exclusivement juif, mais de nos jours il n’existe plus d’États ethniquement ou religieusement purs. On en aurait fini avec l’État des Assassins juifs et Israël se verrait pacifiquement absorbé dans la région et les descendants de juifs dans chacune de leurs nations actuelles.
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Il est minuit moins cinq, docteur Sharon – Israel Shamir (2003)
Gaza, des Souris et des hommes (2006)
Joindre l’auteur: adam@israelsham
Source : https://plumenclume.org/blog/531-le-retour-des-assassins
Source d’origine : https://www.unz.com/ishamir/Un the-assassins-are-back/
URL de cet article : http://blog.lesgrossesorchadeslesamplesthalameges.fr/index.php/les-assassins-sont-de-retour/
Février 2020
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