Une mise au point qui s’imposait
Avant de remettre notre blog en longue pause.
Parce qu’il fallait – enfin – que quelqu’un le dise, et grand merci à Bruno Guigue de l’avoir fait !
Il lui faudra peut-être oser dire un jour quel fut le rôle exact, dans cette guerre, du capitalisme occidental, dont Hitler fut le bras armé contre l’URSS et non l’inverse, mais n’est-ce pas ce que fait déjà, avec implacabilité, Mme Annie Lacroix-Riz ?
Sur le fameux pacte, signé par un Staline mortellement forcé de gagner du temps, après que les Français et les Britanniques dont il avait sollicité l’alliance l’eussent envoyé se faire foutre, on lira ou relira, écoutera ou réécoutera Henri Guillemin. Comme toujours, mais surtout comme tout ce qui concerne ce qu’il a directement vécu.
Sur Trotski et l’Armée Rouge battus devant Varsovie en 1920 par le général Weygand, on lira ou on relira, parce qu’il était sur les lieux, Curzio Malaparte (oui, qui fut fasciste en Italie après cinq ans passés à combattre en première ligne pour la France, dans la première der des der) : Technique du coup d’État.
Enfin, pour notre compte personnel, nous aimerions qu’un jour un historien honnête, rigoureux et talentueux, tel que le décrivait au IIe siècle de notre ère Lucien de Samosate, examine le cas Trotski et son opposition à Lénine – de la première minute à la dernière ! – dans l’optique non de ses idées mais de son nomadisme invétéré, qualifié d’« internationalisme » par ceux qui ne veulent point voir tout ce qu’entraîne ce nomadisme constitutif, qui a fait dire à Byron qu’Abel avait tué Caïn et non l’inverse.
Pour les conséquences actuelles, voir Jérusalem ces jours-ci.
Hannah Arendt et la mystification du « système totalitaire »
Bruno Guigue – Entelekheia – 10.5.2021
Paru dans la revue Étincelles, sur la page Facebook de l’auteur, Palestine-solidarité, etc.
La confusion du langage est un des premiers outils de de la manipulation de l’opinion publique – ce que Noam Chomsky appelle « la fabrication du consentement ». Quelles que soient les opinions qu’on en retirera, il faut donc d’abord revenir aux bases : des définitions claires et précises, tout simplement. Bravo à Bruno Guigue pour son travail inlassable dans ce sens.
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Faut-il le rappeler ? Même la date que nous commémorons en Occident est fausse : la Wehrmacht a capitulé devant l’Armée Rouge le 9 mai à l’heure de Moscou, et non le 8. Falsification qui en recoupe une autre : oblitérant l’effort colossal accompli par l’URSS pour abattre le IIIe Reich, la vulgate anticommuniste a repris la formule de Trotski affirmant en 1939 que Staline et Hitler sont des «étoiles jumelles». La lutte titanesque entre la Wehrmacht et l’Armée Rouge, en somme, aurait provoqué une illusion d’optique : comme l’arbre cache la forêt, leur affrontement militaire aurait masqué la connivence entre les deux tyrannies du siècle. Portés aux nues par les sphères médiatiques et universitaires du monde occidental, les travaux de Hannah Arendt, manifestement, ont joué un rôle déterminant dans cette interprétation de l’histoire. Car pour la philosophe allemande, le totalitarisme est un phénomène à double face : le nazisme et le stalinisme. Les partis totalitaires ont une idéologie rigide et une structure sectaire. Le pouvoir du chef y est absolu, et la communauté soudée par une foi sans réserve dans ses vertus surhumaines. La suppression de l’espace public et le règne de l’arbitraire policier, invariablement, signent la dissolution de la société dans l’État et de l’État dans le parti.
Source : http://www.entelekheia.fr/2021/05/10/hannah-arendt-et-la-mystification-du-systeme-totalitaire/
Pendant qu’on y est, et parce que cela s’impose aussi :
Sans le filtre des médias dominants.
Victoire sur le nazisme : Poutine appelle les États-Unis à ne pas oublier les leçons de l’histoire
le cri des peuples – 10.5.2021
Discours de Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie, à l’occasion de la commémoration du 76e anniversaire de la victoire contre le nazisme, le 9 mai 2021.
Source : en.kremlin.ru
Traduction : lecridespeuples.fr
Transcription :
Vladimir Poutine : Citoyens de Russie,
Chers vétérans,
Camarades soldats et marins, sergents et adjudants, aspirants et sergents-majors,
Camarades officiers, généraux et amiraux,
Joyeux jour de la victoire ! La victoire avait une importance historique colossale pour le destin du monde entier. C’est une fête qui a toujours été et restera un jour sacré pour la Russie, pour notre nation.
C’est notre fête de plein droit, car nous sommes les parents de sang de ceux qui ont vaincu, écrasé, détruit le nazisme. Elle est à nous parce que nous descendons de la génération des vainqueurs, une génération dont nous sommes fiers et que nous tenons en grand honneur.
À lire et à écouter puisque vous vous êtes laissés confiner :
George Gordon Byron
Caïn
Allia – 2004 – Poche
148 pages
1.48 €
Caïn, publié en 1821, n’est pas une tragédie au sens classique du terme mais un « mystère » métaphysique aux tonalités baudelairiennes, où dominent les thèmes de la révolte, de la faute et de la culpabilité. Cette pièce noire, tourmentée, qui fit scandale lors de sa parution, fut encensée par Goethe et Shelley et, un siècle plus tard, par Tomasi di Lampedusa.
Henri Guillemin
Le désastre politico-militaire de 1940
https://www.youtube.com/watch?v=CK9QjdFIpr0
Curzio Malaparte
Technique du coup d’État
Grasset – Les cahiers rouges – 2008
224 pages
8,75 €
Charles-Henri Favrod sur ce livre :
Publié en français en 1931, Technique du coup d’Etat est une série de réflexions sur les moyens de s’emparer du pouvoir à la lumière de différentes expériences historiques modernes. Écrit par l’écrivain et essayiste italien Curzio Malaparte, pseudonyme de Kurt Erich Suckert (1898-1957), l’ouvrage date de l’époque où l’auteur s’est momentanément réfugié à Paris après avoir rompu avec le Duce Mussolini. Technique du coup d’État, dont la publication coïncide avec la montée du fascisme en Europe, a soulevé une grande controverse sur les buts et les tendances de Malaparte, accusé tantôt de cynisme, tantôt d’hypocrisie.
Curzio Malaparte se propose de montrer comment on conquiert un État moderne et comment on le défend, avec la ferme et surprenante conviction que ce problème n’est pas tellement politique ou idéologique, mais essentiellement technique. À cette fin, il emprunte divers exemples à l’histoire contemporaine et commence par la Révolution russe. Pour lui, c’est Trotski qui est l’artisan du coup d’État bolchevique, son tacticien, tandis que Lénine est le stratège et le triomphateur. Méditant sur l’histoire du coup d’État manqué de Trotski, après la mort de Lénine, Malaparte constate que « le seul homme d’État européen qui ait su profiter de la leçon d’octobre 1917, c’est Staline ».
Dans le chapitre consacré à l’expérience polonaise de 1920, « L’ordre règne à Varsovie », l’auteur, qui se trouvait sur les lieux du drame, raconte l’attaque avortée des troupes bolcheviques contre la capitale polonaise, pourtant très mal défendue. Il en tire la conclusion que Pilsudski n’est qu’« un Catilina bourgeois préoccupé de sauvegarder les apparences légales ». Il observe ensuite que le général Wolfgang Kapp a échoué en 1920 dans sa tentative contre la jeune république allemande parce qu’il n’a pas su voir que ce qui constitue l’essence de l’État moderne, ce sont les centrales électriques, les gares et les usines, et non le Reichstag et les ministères. Primo de Rivera, dont la pensée s’apparente à celle de Pilsudski, n’a fait en réalité qu’imiter Bonaparte, « auteur du premier coup d’État moderne ».
Malaparte consacre les deux derniers chapitres au coup d’État de Mussolini et à la possible accession au pouvoir de Hitler. Si le premier est, aux yeux de l’écrivain, un véritable homme politique, qui n’hésite pas devant la violence nécessaire à la réussite et à sa sauvegarde, en politique « Adolf Hitler n’est qu’une femme pusillanime lors du putsch de Munich en 1923 ». Les propos très désobligeants qu’il réserve au futur Führer vaudront à Malaparte d’être emprisonné et persécuté pour « propagande antifasciste à l’étranger ».
[Où Catilina rejoint Robespierre, Cromwell, Lénine, Frédéric II et Lloyd George dans les rangs « petits-bourgeois ». NdGO]
Curzio Malaparte
En Russie et en Chine
Les Belles Lettres – 1ère édition : 2014
272 pages
14,90 €
Quatrième de couverture :
Le 19 juillet 1957 mourait Curzio Malaparte et ce livre, posthume, nous révèle du grand écrivain qu’il fut un visage inattendu ou, tout au moins, que laissent rarement deviner ses autres œuvres. Publié tel qu’il a été retrouvé parmi les papiers de l’auteur qui y travailla aussi longtemps que la maladie le lui permit, c’est un livre à la fois inachevé et achevé ; inachevé matériellement car, pour une bonne partie, il est composé de simples notes, mais moralement achevé car, encore qu’on y retrouve à chaque page le génial témoin de Kaputt et de La Peau, c’est un nouveau Malaparte, le vrai, qui y apparaît : l’homme Malaparte et non plus seulement l’écrivain Malaparte. L’expérience intensément vécue de cette nouvelle réalité humaine qu’il a trouvée en Chine n’est plus pour lui, comme elle l’aurait été jadis, un prétexte à se mettre en scène : elle est l’occasion d’un examen de conscience, d’une confrontation avec soi-même et les autres, où le « je » s’efface pour la première fois et définitivement. Et, ainsi, ce voyage En Russie et en Chine est plus que le très pittoresque récit d’une aventure asiatique, c’est aussi et surtout celui, profondément émouvant, d’un itinéraire spirituel.
[Faut-il rappeler qu’avant d’entreprendre ce voyage en Chine, Malaparte avait découvert les favellas d’Amérique latine et rencontré Pablo Neruda ? NdGO]
Lucien de Samosate
Comment il faut écrire l’histoire
Le savoir en poche – 2017
34 pages
8,17 €
Voir Jérusalem ces jours-ci :
https://strategika51.org/author/strategika51/
Mis en ligne le 11 mai 2021
One Responses
Oui, il était temps qu’un honnête homme dise ces choses. Il y a sûrement eu aussi, dans la béatification néo-freudienne d’Hannah Arendt, une bonne louche de préjugé féministe instrumentalisé. Simone Weil, à la pensée et à l’action autrement profondes, aurait dû prendre cette place de sainte patronne de l’après-guerre, avec l’espagnole Maria Zambrano, auteur de L’Agonie de l’Europe, très proche de Simone Weil dans son inspiration, avec le recul supplémentaire d’une tournure d’esprit mystique dans la continuité d’Al Andalus.