Rapprocher le passé de la Chine et l’avenir de l’humanité – Partie 1

 

 

Straight-Bat – The Saker Blog – 27.6.2020

 

Traduction : c.l. pour L.G.O.

 

 

 

 

« Cet article sera présenté en 3 parties et dans 3 articles de blog différents »

annonçait l’auteur…

 

Mais comme il est vieux de deux ans, notre traduction des 3 parties est présentée ici en une seule fois. À nos lecteurs de le lire comme il leur plaira. Ou pas.

 

 

 

 

1. INTRODUCTION

Le monde vacille sous l’omniprésence du virus covid19. Depuis janvier 2020, les paramètres économiques et sociologiques se sont effondrés les uns après les autres dans tous les pays du monde. D’ici la fin de l’année 2020, lorsque la pandémie de corona sera sous contrôle dans les 25 premiers pays (ceux avec un PIB PPA supérieur à 1 trillion de dollars en 2018, selon les estimations de la Banque Mondiale), le tissu économique mondial aura été déchiré avec un impact inouï sur la société, dont voici quelques exemples :

 

– des millions de personnes malades auront besoin de soins médicaux,

– des millions de chômeurs (dont le nombre ne cesse d’augmenter) auront besoin de nourriture et d’un toit,

–  au moins un tiers des moyennes et grandes unités de production industrielle et de services publics seront financièrement malades, tandis que près de la moitié des petites unités fermeront définitivement,

– en raison de la baisse du pouvoir d’achat global des citoyens, la demande de produits manufacturés diminuera de façon spectaculaire, tandis que la demande de médicaments augmentera simultanément,

– le système bancaire sera soumis à un stress énorme pour renégocier avec ses clients le rééchelonnement des remboursements et/ou la radiation des prêts,

– Les gouvernements seront gênés par la baisse de la collecte des impôts, l’appauvrissement à grande échelle qui entraînera une agitation populaire croissante.

 

Dans ces circonstances, quel serait le plan d’action de l’oligarchie mondiale qui possède collectivement les secteurs bancaire et industriel et qui maintient l’ordre mondial unipolaire actuel par le biais de membres choisis du soi-disant État Profond (USA/5-Yeux/Israël) ? Rappelons-nous qu’il n’existe rien de tel qu’un « capitalisme national » – en vertu de sa caractéristique expansionniste, le « capitalisme » a toujours été mondial dans ses buts, ce qui a donné naissance à un « système mondial » dont les sociétés industriellement avancées forment le « noyau » et le reste du monde la « périphérie ». L’oligarchie mondiale a des intérêts dans TOUS les coins et recoins du globe. Les élites de l’État Profond entretiennent de solides alliances économiques et politiques avec presque tous les pays, où TOUS les partis politiques importants et les grandes entreprises de toutes les couleurs sont unis par un pacte invisible dont l’objectif est d’étendre continuellement leur soutien à l’oligarchie mondiale et d’en être, en retour, les bénéficiaires. (Cuba et la Corée du Nord sont les exceptions à cette règle, en raison de leur politique de gouvernement ouvertement et farouchement « indépendante » ; depuis deux décennies, les gouvernements de la Russie, de la Chine, de l’Iran et du Venezuela résistent de leur côté avec enthousiasme à l’oligarchie mondiale et à ses partenaires locaux). 

La réponse à cette question est la suivante : la politique de l’État et sa mise en œuvre sont orientées vers l’accumulation du capital dans tous les pays, à l’exception des six pays susmentionnés. À part l’obtention de sommes énormes sous forme de plans de sauvetage des gouvernements et de programmes de rachat d’actions par le biais de prêts à taux zéro, l’oligarchie (1% de la population) et les élites de service (5 à 15% de la population) ne s’intéressent guère à la gouvernance et au soutien des gens ordinaires en détresse.

[Lien : https://www.cnbc.com/2020/05/21/american-billionaires-got-434-billion-richer-during-the-pandemic.html]

Un examen plus approfondi révèle que, parmi ces six pays du « camp de la résistance », seule la Chine possède à la fois : la masse terrestre et la population qui puissent être qualifiées de « ressources » nécessaires pour résister à l’ordre mondial unipolaire, faire reculer la marche en avant du capitalisme mondial, et construire simultanément un ordre mondial multipolaire et une société plus équitable, en étroite coordination avec la Russie. Il est donc naturel de s’attendre à ce que la Chine dirige le rajeunissement socio-économique du monde avec le soutien total de la Russie. La Chine est également bien placée pour exploiter les forces de l’Iran, de la Corée du Nord, de Cuba et du Venezuela. Au nom des personnes éprises de paix qui croient en la vérité, en la justice et en l’égalité, permettez-moi d’approfondir cette proposition.

Le voyage commencera par un examen de la société chinoise des Qing ainsi que de l’économie et de l’industrie de l’ère Qing, puis abordera l’époque communiste actuelle et se terminera par les possibilités futures. Il est nécessaire de regarder d’abord en arrière, car une société qui a un passé important aura également un avenir remarquable.

 

 

2. LA CHINE A L’ÉPOQUE QING

Lorsqu’on mentionne les trois empires successifs : Yuan-Ming-Qing dans la Chine de la fin du Moyen Âge et du début de l’ère moderne, on oublie souvent que l’empire Yuan était divisé en deux composantes : les empires Ming et Yuan du Nord, et la plupart des régions qui relevaient de ces deux empires ont été placées sous le contrôle de l’empire Qing. Même si, au cours du « siècle de l’humiliation », qui a débuté en 1839, l’empire Qing a progressivement perdu de vastes territoires dans le nord-est, le nord et le nord-ouest, ainsi que de plus petites étendues de terre dans le sud et dans la mer de Chine méridionale, il convient de reconnaître à l’empire Qing les mérites suivants :

1/ Nonobstant les traitements préférentiels accordés aux aristocrates mandchous, les empereurs Qing ont transformé l’empire chinois en un empire multiethnique et multilingue dans sa politique et ses procédures officielles (contrairement à l’ère Ming qui avait une vision véritablement Han chinoise), créant ainsi une base fondamentale de la société chinoise moderne. En 1618, la dynastie Qing, formée par le chef tribal Jurchen/Manchu, renonça à la suzeraineté des Ming et créa un royaume mandchou. En 1648, la dynastie Qing, formée par le chef tribal Jurchen/Manchu, étendit son contrôle sur la majeure partie de l’ancien empire Ming grâce à une force militaire dans laquelle les Bannières mandchoues représentaient moins de 20% des effectifs, tandis que les Bannières Han en représentaient plus de 70%. Ces données illustrent bien le caractère multiethnique de la politique des Qing.

2/ Les empereurs Qing successifs ont entretenu des relations chaleureuses avec tous les États tributaires et protectorats jusqu’au début du « siècle de l’humiliation » en 1839. Les commentateurs et les universitaires qui évoquent le concept de Westphalie lorsqu’ils discutent des relations entre les empires/ royaumes de l’Asie précoloniale oublient généralement que la souveraineté westphalienne était un concept nécessaire et dérivé de l’environnement « féodal » de l’Europe médiévale et du début des temps modernes. À l’exception du Japon, la politique des empires/royaumes asiatiques n’a jamais introduit le « féodalisme » dans l’Asie médiévale et moderne. Par conséquent, la relation entre l’empire Qing et les différentes catégories de vassaux avait de multiples vecteurs qui ne peuvent être vus à travers le prisme westphalien. Même si l’empire Qing ne manquait pas de main-d’œuvre ou des ressources militaires nécessaires pour régner directement sur ses vassaux, il était à l’aise avec le système tributaire (fondé sur les idéaux confucéens) en vertu duquel les différents royaumes entourant l’empire chinois acceptaient l’empereur chinois comme l’autorité prédominante de cette partie du monde, et l’empire chinois bienveillant garantissait la possibilité d’échanges et de commerce pacifiques à travers l’Asie centrale, l’Asie de l’Est et l’Asie du Sud-Est

3/ Le maintien du système d’accès aux institutions bureaucratiques fondé sur le mérite et la prééminence du système de valeurs familiales confucéen (tous deux adoptés par les dynasties précédentes) a permis à la Chine des Qing d’entrer dans l’ère moderne en conservant intactes les bases socio-politiques fondamentales de la société chinoise. Ces deux anciennes pratiques chinoises sont appréciées dans toutes les sociétés modernes du monde.

À la fin du XVIIIe siècle, l’empire Qing s’étendait sur une superficie d’environ 14 millions de kilomètres carrés et sa population était estimée à environ 300 millions d’habitants. La société Qing se divisait principalement en cinq catégories :

  • – Les fonctionnaires bureaucrates
  • – L’aristocratie
  • – Les littéraires et les érudits
  • – Les « roturiers » respectables
    • agriculteurs
    • artisans
    • marchands
  • – Les roturiers « avilis » (esclaves, serviteurs, amuseurs, prostituées, criminels tatoués, employés de très bas niveau des fonctionnaires).

Environ 80% de la population totale était composée de paysans. Les paysans propriétaires de terres constituaient la plus grande force de travail, avec la présence d’un nombre insignifiant de travailleurs salariés (sans terre). L’État recrutait également du personnel militaire dans la population rurale.

 

Agriculture et utilisation des terres :

Le secteur agricole était la plus grande source d’emploi dans la société chinoise. Grâce aux droits de propriété privée sur les terres, les agriculteurs étaient naturellement incités à produire davantage et à diversifier leurs cultures. Il en résultait une augmentation de la productivité. La paysannerie propriétaire de terres a également bénéficié de la politique de l’État qui soutenait l’embauche de travailleurs. D’autre part, les taxes agricoles représentaient la plus grande part des recettes de l’État. Ainsi, la paysannerie propriétaire de terres et l’État fiscalo-militaire étaient-ils tous deux incités à l’expansion territoriale. En outre, l’État réinstallait souvent les agriculteurs dans les nouvelles régions en leur fournissant du matériel (semences et outils agricoles) et des moyens financiers (droits de passage non prélevés et exonération fiscale). Au 18e siècle, les « réfugiés » Han du nord de la Chine, qui souffraient de la sécheresse et des inondations, ont été réinstallés en Mandchourie et en Mongolie intérieure. Les agriculteurs Han ont cultivé environ 0,5 million d’hectares de terres privées appartenant aux élites mandchoues en Mandchourie et environ 200.000 hectares de terres qui faisaient partie de domaines nobles et de terres de bannerets.

–D’autres actions innovantes ont également été menées – introduction du maïs et des patates douces, culture à double récolte, engrais tels que les gâteaux de haricots, réintroduction de la culture du riz à maturation précoce – qui ont contribué à augmenter la productivité et à convertir les terres marginales en terres agricoles régulières. Un système de surveillance des prix des céréales a aidé les dirigeants à éliminer les graves pénuries, ainsi que la thésaurisation et les chocs de prix pour les consommateurs.

Les agriculteurs, sur la base d’une agriculture à haut rendement, produisaient un « excédent » constant et important qui garantissait le développement de l’économie de marché dans la Chine (médiévale et) moderne. Les historiens estiment que jusqu’à un tiers de la production agricole chinoise après impôt faisait l’objet d’échanges sur le marché. Cet excédent est également devenu la base de la croissance et du développement d’autres secteurs de l’économie.

 

Échanges et commerce :

Pour la première fois, un pourcentage important de ménages agricoles a commencé à produire des récoltes destinées à être vendues sur les marchés locaux et nationaux plutôt que pour leur seule consommation ou le troc dans l’économie traditionnelle. Les récoltes excédentaires ont été placées sur le marché national pour être vendues, intégrant ainsi les agriculteurs dans l’économie commerciale à partir de la base. Cela a naturellement conduit les régions à se spécialiser dans certaines cultures commerciales destinées à l’exportation, l’économie chinoise devenant de plus en plus dépendante du commerce interrégional de produits de base tels que le coton, les céréales, les haricots, les huiles végétales, les produits forestiers, les produits animaux et les engrais.

La classe marchande fonctionnait à l’intérieur des limites imposées par l’État. Au sommet de la structure du marché, l’État contrôlait les produits de base essentiels comme le sel, le vin, le fer et l’acier, etc. L’État Qing refusait les nouveaux droits miniers aux marchands privés. L’État Qing a aussi refusé de nouveaux droits d’exploitation minière aux commerçants privés. La classe marchande chinoise disposait donc d’une plateforme illimitée pour s’engager dans des transactions commerciales au niveau des villages (échanges commerciaux avec les agriculteurs, basés sur les excédents) et des régions (on estime que l’empire Qing comptait entre 1.000 et 1.500 régions de ce type). Le commerce entre les marchés au niveau du village, de la région et de la province s’est développé en un réseau couvrant une grande partie de l’empire Qing. Par conséquent, la classe marchande est devenue très riche mais n’avait pas assez de force (en tant que classe) pour influencer l’économie et la politique de l’État.

Les guildes de marchands proliférèrent dans toutes les villes chinoises en pleine expansion et s’approvisionnèrent en articles manufacturés (par des artisans et des roturiers) tels que le textile, l’artisanat, la céramique, la soie, le papier, la papeterie et les ustensiles de cuisine. L’administration plus efficace du Grand Canal a créé de nouvelles possibilités pour les marchands privés de transporter facilement des marchandises dans l’empire Qing. On estime qu’au début du XIXe siècle, la Chine produisait jusqu’à un tiers de l’ensemble des produits manufacturés du monde. Bien qu’en 1685, l’État ait ouvert le commerce maritime aux marchands de la côte, en établissant des bureaux de douane dans des villes portuaires comme Guangzhou, Xiamen et Ningbo, cet arrangement commercial a été abandonné en raison de mouvements politiques internes. Au moment où le commerce maritime est redevenu légal, le commerce avec l’Europe de l’Ouest s’est développé à tel point que Canton abritait à elle seule plus de quarante maisons de commerce. La Chine importait principalement des chevaux de guerre (pour l’armée) et des métaux (pour la monnaie). La Chine exportait de la soie, des céramiques, des textiles, des produits métalliques (en fer, cuivre, bronze, etc.), des produits artisanaux non métalliques et du thé. Le commerce entre la Chine et l’Europe a augmenté à un taux annuel moyen de 4 % entre 1719 et 1806. L’État Qing a instauré le système de Canton en 1756, qui limitait le commerce maritime à Canton/Guangzhou et accordait le monopole des droits commerciaux aux marchands chinois privés. Les « compagnies » marchandes européennes, la British East India Company et la Dutch East India Company, s’étaient vu accorder des droits de monopole similaires par leurs gouvernements longtemps auparavant. Au début de l’ère moderne, la demande de produits chinois en Europe était satisfaite par l’importation, dont les paiements étaient effectués en argent (provenant des colonies de l’hémisphère occidental soumises aux puissances coloniales européennes). L’afflux d’argent qui en résultait augmentait la masse monétaire, facilitant ainsi la croissance de marchés compétitifs et stables. La Chine a donc progressivement adopté l’argent comme monnaie standard pour les transactions à grande échelle et, au début du XVIIIe siècle, la collecte de l’impôt foncier se faisait en argent. La Chine étant autosuffisante pour tous les types de biens de consommation, les importations très faibles ont entraîné un déséquilibre des échanges commerciaux avec l’Europe, ce qui s’est traduit par une fuite de l’argent des puissances européennes. La British East India Company a alors commencé à importer de l’opium en Chine. Les importations d’opium en Chine étaient payées en argent. On estime qu’entre 1821 et 1840, pas moins d’un cinquième de l’argent circulant en Chine a été utilisé pour acheter de l’opium. Alarmé à la fois par la sortie de l’argent et par les dommages que la consommation d’opium causait au peuple chinois, l’empereur a ordonné de mettre fin au commerce de l’opium, ce qui a déclenché des conflits avec les puissances européennes en 1839.

Outre les systèmes de crédit à court terme, l’offre de maisons et de terres agricoles comme garantie pour obtenir de l’argent à long terme était également présente. Mais l’interférence de la communauté et de l’État dans ces contrats, en bloquant les transferts de terres des débiteurs vers les créanciers, a été l’un des facteurs importants pour que le déplacement et la dépossession (base de l’accumulation primitive « capitaliste ») ne prennent jamais racine en Chine.

En raison de la méritocratie « à chances égales » et de la mobilité sociale, les jeunes talents étaient généralement attirés par les lettres et le fonctionnariat (ainsi la famille « Pan » d’Anhui, une des plus riches familles de marchands est-elle passée, en deux siècles, au rang de puissante famille de bureaucrates). La classe des marchands n’était pas considérée comme suffisamment distinguée pour attirer les personnes de talent. Elle ne pouvait rivaliser avec l’influence de l’aristocratie des grands propriétaires terriens, malgré l’influence localisée de marchands très riches. En revanche, l’existence de marchés pour l’acquisition de terres a permis aux marchands de rejoindre la classe des propriétaires terriens.

Certains marchands, animés d’un zèle entrepreneurial, ont migré vers les avant-postes coloniaux européens tels que Manille, Macao et Jakarta afin d’éviter les politiques confucéennes de l’empire (qui plaçaient les marchands et les autres roturiers sur un même plan et les soumettaient au même traitement patriarcal par l’État).

 

Les débuts de la banque :

Les pièces de cuivre étaient utilisées pour les transactions quotidiennes, tandis que l’argent était utilisé pour les transactions plus importantes ainsi que pour le paiement des impôts au gouvernement. Outre la conversion monétaire, les changeurs offraient également des crédits et des services bancaires rudimentaires. Les banques de transfert de fonds se sont développées au cours de cette période. Elles acceptaient les dépôts en espèces des commerçants à un endroit et émettaient des certificats de transfert de fonds, que le commerçant pouvait ensuite emporter ailleurs pour payer son fournisseur. Ce dernier se rendait à son tour à la banque de son quartier et échangeait le certificat contre des pièces. Au XVIIIe siècle, il existait un vaste réseau de banques de ce type, qui ont joué un rôle déterminant dans le développement de l’activité commerciale en Chine.

 

Développement des villes de commerce :

En raison de la commercialisation des produits agricoles excédentaires et de l’essor de l’industrie artisanale (si je puis dire), les marchands se sont engagés dans des échanges interrégionaux et interprovinciaux, grâce à un réseau de transport longue distance. Des villes sont apparues en tant que centres commerciaux pour diriger le flux du commerce intérieur. Comme de plus en plus de personnes voyageaient, des « salles de guilde » sont apparues dans les villes de marché pour loger et héberger ces personnes, parmi lesquelles des marchands, des acheteurs et des vendeurs. On estime qu’environ 45.000 villes de marché se sont développées, dont certaines sont devenues la résidence de certains marchands.

Au milieu du XVIIe siècle, les guildes ont été créées dans un but plus spécifique : faciliter le travail des artisans dans des secteurs sparticuliers tels que le tissage, la menuiserie, la médecine, le travail du fer et de l’acier. Ainsi, ces halles de guildes ont servi de noyau aux villes industrielles, qui se sont ensuite développées pour devenir de grandes villes dotées de biens immobiliers, de systèmes d’approvisionnement en eau, d’égouts, etc.

 

Similitudes et dissemblances avec l’Europe occidentale :

Au XVIIIe siècle, à l’époque des Qing, le niveau de vie dans les régions du sud et de l’est de la Chine était assez élevé : comparable à celui des régions riches de l’Europe occidentale au XIXe siècle. Selon des historiens et des sinologues renommés, les facteurs clés étaient « 1) la rationalité de la croissance induite par les droits de propriété privée, 2) la croissance de la productivité totale des facteurs associée aux révolutions vertes de la Chine des Han aux Ming-Qing et à la révolution économique sous la dynastie Song, et 3) la capacité d’exportation de la Chine (d’où l’excédent de production de la Chine) et les importations d’argent de la Chine (d’où le pouvoir d’achat de l’excédent chinois) ».

Ken Pomeranz a montré que les régions productives centrales de la Chine et de l’Europe occidentale ont toutes deux été confrontées à d’importants goulets d’étranglement sous la forme de contraintes foncières et énergétiques au XIXe siècle. Une combinaison de facteurs nationaux et internationaux ainsi que beaucoup de chance ont permis à l’Angleterre de surmonter ces difficultés et de s’engager sur la voie d’une industrialisation à forte intensité de capital. Selon Pomeranz, les deux principaux facteurs en ont été « 1) les réserves de charbon bien situées, qui, étant proches des zones centrales, ont permis à la Grande-Bretagne d’échapper plus facilement à ses contraintes énergétiques, et 2) la colonisation coercitive de l’hémisphère occidental par la Grande-Bretagne, qui a servi de source de biens à forte teneur terrienne tels que le coton, le sucre et les céréales, tout en fournissant un marché pour ses produits manufacturés ». En Chine, où les réserves de charbon n’étaient pas aussi facilement accessibles et où une politique de colonisation coercitive, susceptible de lui fournir des terres gratuites, était absente, les contraintes écologiques ont conduit à se tourner vers une agriculture à forte intensité de main-d’œuvre.

Un autre courant de pensée considère que (1) les familles d’une « classe forte entrepreneuriale urbaine, capable de concentrer le surplus agraire pour favoriser une industrie capitaliste » étaient absentes en Chine, contrairement au Royaume-Uni, (2) dans les secteurs de l’agriculture et de l’industrie artisanale, la politique des empereurs Qing d’endiguement des conflits (entre propriétaire et locataire, entre le propriétaire et la main-d’œuvre) se distinguait par une attitude apaisante et accommodante envers les locataires et les travailleurs (à la différence du Royaume-Uni où les marchands, les propriétaires et les entrepreneurs reçurent et reçoivent un soutien inconditionnel de l’État), ce qui, en fin de compte, a nui, en Chine, à l’accumulation de capital.

 

Indicateurs socio-économiques :

Selon Maddison, la part en pourcentage du PIB mondial et du PIB par habitant de la Chine, de l’Europe occidentale et des USA :

 

Année Chine

GDP

China

GDP per Capita

Europe

de l’ouest

GDP

Europe de l’ouest GDP per Capita USA

GDP

USA

GDP per Capita

1500 24.9 1.1 15.5 1.4
1820 33.0 0.9 20.4 1.9 1.8 1.8
1940 6.4 0.3 27.5 2.5 20.6 3.6

 

Selon Allen et Pomeranz, indicateurs socio-économiques sélectionnés dans la Chine et l’Angleterre du début de l’ère moderne :

 

Pays Espérance de vie moyenne à la naissance, au milieu du 18e s. Apport calorique moyen par jour, mâles, au 19e s. Productivité de la terre de 1806 à 1820 (Livre/Acre) Productivité du travail de 1806 à 1820 (Pence/Day)
Chine 35 to 39 Environ 2600 26.1 51.3
Angleterre 31 to 34 2000 to 3500 3.3 60.9

 

Observations significatives sur la Chine des Qing :

  1. Bien que la société chinoise ait conservé une solide avance sur le reste du monde en matière de science et de technologie (comme l’a démontré de manière concluante Joseph Needham), notamment dans les domaines de la métallurgie, de la porcelaine, de la poudre à canon, de la boussole, de la soie, du papier, de l’imprimerie, de la turbine hydraulique, de la phytothérapie et dans bien d’autres domaines, la Chine a mis du temps à rattraper la technologie qui concerne (a) les machines industrielles, (b) les systèmes de transport, (c) les armes militaires développées en Europe occidentale depuis le milieu du XVIIIe siècle.
  2. À la fin du XVIIIe siècle, lorsque l’expansion territoriale s’est arrêtée, la population a continué à croître sainement. En raison de la pratique dominante de l’héritage égalitaire, les propriétaires agricoles ont commencé à être confrontés au problème de la diminution de leurs exploitations, ce qui a entraîné une baisse de la prospérité de la classe des agriculteurs, qui s’est finalement traduite par des recettes fiscales moins importantes que prévu pour l’État chinois. La combinaison de facteurs clés tels que (a) le hooliganisme et le colonialisme organisés par les sociétés commerciales européennes, (b) le mécontentement interne et la révolte croissante parmi les gens du peuple, et (c) la concurrence territoriale avec les empires russe et japonais, s’est avérée fatale après 1840.
  3. Avec une agriculture florissante et une splendide industrie artisanale qui répondait à la demande intérieure, la Chine avait surtout besoin d’importer des chevaux de guerre et des métaux. C’était en contraste direct avec les États d’Europe occidentale qui avaient besoin d’importer des biens de consommation de Chine mais ne pouvaient offrir de biens à exporter pour maintenir un certain équilibre dans le commerce, et qui ont donc « exporté » de l’opium. L’administration Qing aurait dû analyser préventivement cette relation commerciale problématique afin de prendre les mesures nécessaires pour empêcher de tels développements.
  4. Le débat entre un grand nombre d’historiens et de sinologues sur la question de savoir « pourquoi la Chine n’a pas pu développer le capitalisme avant l’Europe occidentale » se poursuit à ce jour. Le fait est que les équilibres sociaux, économiques et politiques qui existaient en Chine depuis le premier millénaire avant notre ère (en grande partie grâce à la pensée confucéenne omniprésente en Chine continentale et à la pensée bouddhiste dans les régions dominées par les Mongols et les Tibétains) étaient diamétralement opposés au concept de ce qu’on appelle « l’esprit animal » du capitalisme sioniste. La riche classe des propriétaires fonciers et des marchands en Chine n’aurait jamais pu rechercher le profit et l’accumulation sans fin du capital par le contrôle de la super-structure de l’État. Cependant, la société dynamique, travailleuse et fondée sur le mérite, a néanmoins permis la commercialisation, le commerce, la proto-industrialisation et l’urbanisation à grande échelle depuis l’époque médiévale des Song.

 

 

3. LA CHINE À L’ÈRE MAO

Depuis le milieu du XIXe siècle, les assauts successifs des puissances coloniales d’Europe occidentale et des empires russo-japonais ont dévasté la Chine : d’abord l’empire Qing jusqu’en 1911, puis la Chine nationaliste jusqu’en 1945. Surmontant le « siècle d’humiliation » au prix d’une longue lutte armée et d’énormes pertes de vies humaines, le parti communiste chinois a pris le pouvoir en Chine continentale en 1949. Mao Tse Toung a perdu sa femme, un fils, deux frères et une sœur, Zhou Enlai a perdu tous ses enfants, tandis que Zhu De a trouvé la tête décapitée de sa femme enceinte clouée à la porte de la ville. À l’époque, la Chine avait une économie agraire arriérée. La pauvreté, l’anarchie et l’analphabétisme y étaient répandus ; sur ses cinq cents millions d’habitants, huit personnes sur dix étaient analphabètes et une personne sur huit était toxicomane. À cette époque, les paysans devaient abandonner les deux tiers de leur production en loyer/impôt et les gens se vendaient pour éviter de mourir de faim.

D’ici, on ne peut que regarder la Chine de 1949 avec une admiration stupéfaite pour la façon dont l’Armée de Libération du Peuple a accompli sa tâche de libération sous la direction de Mao et de ses camarades, tâche qui a culminé avec la prise de contrôle du pouvoir par le PCC. À ce jour, aucun autre leader révolutionnaire, où que ce soit dans le monde, n’a réussi à mobiliser un si grand nombre de ses compatriotes à travers des difficultés aussi énormes pendant des décennies. Les actions initiales furent spectaculairement promptes et efficaces. Le système bancaire fut nationalisé et la Banque Populaire de Chine devint la banque centrale du pays. Le gouvernement resserra le crédit, fixa la valeur de la monnaie, mit en œuvre des budgets gouvernementaux contrôlés de manière centralisée : tout cela permettant de contrôler strictement l’inflation. Le PCC entreprit aussi un programme de réforme agraire par lequel 45% des terres arables étaient redistribuées aux 65% de familles paysannes qui possédaient peu ou pas de terres. Ces paysans furent encouragés à former des sortes d’équipes d’aide mutuelle de 7 à 8 ménages. Le PCC nationalisa en outre la plupart des unités industrielles dès son arrivée au pouvoir. En 1952, 17% des unités industrielles n’étaient pas des entreprises d’État, contre environ 65% sous le Kuomintang.

Le premier plan quinquennal (1953-57) suivit le modèle de l’Union Soviétique qui accordait la priorité au développement de l’industrie lourde. Le gouvernement chinois en contrôlait environ 67% en tant qu’entreprises d’État directes et 33% en tant qu’entreprises mixtes d’État-privées. Il n’y avait plus d’entreprise privée. « Des secteurs clés tels que l’extraction du charbon et du minerai de fer, la production d’électricité, la fabrication de machines lourdes, etc, furent modernisés grâce à la construction de centaines de nouvelles usines, réalisée avec l’aide d’ingénieurs envoyés par l’Union Soviétique ». La croissance de la production industrielle augmenta à un rythme moyen de 19 % par an au cours de cette période. Au cours de la même période, plus de 90% des industries artisanales furent organisées en coopératives.

Le secteur agricole ne répondit cependant pas aux attentes et ne connut qu’un taux de croissance moyen de 4% par an. À partir d’« équipes d’entraide » peu structurées, les paysans furent encouragés à former des « coopératives », dans lesquelles les familles individuelles recevaient encore un certain revenu sur la base de leur contribution à la production de la terre. À l’étape suivante, des « collectifs » furent formés, dans lesquels le revenu était uniquement basé sur la quantité de travail fournie par chaque famille. En outre, chaque famille était autorisée à conserver une petite parcelle pour cultiver des légumes et des fruits pour sa consommation personnelle. En 1957, le processus de collectivisation couvrait 93% de tous les ménages agricoles.

Le deuxième plan quinquennal (1958-62) fut abandonné. Les dirigeants introduisirent une nouvelle série de politiques et décidèrent d’impliquer l’ensemble de la population afin de réaliser un « grand bond » dans la production de tous les secteurs de l’économie en même temps. Des communes à trois niveaux furent construites pour être le fer de lance de ce bond en avant de la production agricole : au niveau supérieur, l’administration centrale de la commune, au niveau suivant, 20 brigades de production ou davantage, représentées par les anciens « collectifs », et au dernier niveau, une équipe de production composée d’environ 30 familles du village. Ils tentèrent de construire un vaste réseau d’irrigation en employant des agriculteurs sans emploi ou sous-employés : l’objectif final était d’augmenter la production agricole et l’emploi. De même, la main-d’œuvre rurale excédentaire fut employée dans des milliers de projets industriels à petite échelle et à faible technologie dans les zones rurales – l’objectif final étant d’augmenter la production et l’emploi industriels et agricoles. Ces petites industries (y compris les fours pour la fabrication du fer) étant également gérées par des communes. Les communes s’ avérèrent trop volumineuses pour remplir efficacement leurs fonctions administratives. En raison d’une mauvaise gestion économique et d’une météo défavorable pendant deux ans, la production alimentaire chuta en 1960 et 1961. En conséquence, la Chine fut confrontée à une famine – en 1960, le taux de mortalité fut de 2,54 %, alors que le taux de mortalité moyen était de 1,14 % en 1957 et 1958.

En 1958, la croissance industrielle était de 55%, en 1961, elle était de 38%. En 1962, l’effondrement économique général poussa les dirigeants à concevoir une nouvelle série de politiques économiques. Les taxes agricoles furent réduites, les fournitures d’engrais chimiques accrues, les machines agricoles mises à disposition, les prix d’achat des produits agricoles augmentés, le rôle de l’administration centrale de la commune considérablement réduit et les parcelles agricoles privées restaurées. Dans l’industrie, l’accent fut de nouveau été mis sur la planification, l’importation de machines étrangères technologiquement avancées commença, des centrales hydroélectriques furent créées, les anciennes usines furent rénovées, des usines de production d’engrais chimiques et des usines d’agro-machines furent créées en grand nombre. Entre 1961 et 1966, la croissance annuelle moyenne de la production industrielle dépassa les 10%, tandis que la production agricole augmentait à un taux moyen de plus de 9% par an.

La révolution culturelle constitua un bouleversement politique par lequel Mao rétablit son contrôle sur le parti en écartant les factions de centre droit et de centre gauche du PCC. Elle n’entraîna pas de changements majeurs dans les politiques économiques officielles ni dans le modèle économique de base. Néanmoins, les perturbations qu’elle a provoquées avaient affecté la société urbaine, ce qui eut pour conséquence une baisse de 14% de la production industrielle en 1967. En 1969, le secteur industriel avait retrouvé un taux de croissance normal. Le quatrième plan quinquennal (1971-1975) vit la reprise de la croissance économique systématique, en particulier dans le secteur industriel (avec la création de nouvelles usines pour l’exploration et le raffinage du pétrole, les engrais, l’acier, les matériaux de construction, les produits chimiques, etc.) Le pétrole et le charbon sont exportés depuis le début des années 1970. Avec un taux moyen de 8% pour le secteur industriel et de 3,8% pour le secteur agricole, il est clair que, contrairement à l’image convenue, l’ère Mao a fait de la croissance industrielle sa priorité absolue.

Les dirigeants du PCC ont réévalué la situation économique et Zhou Enlai a présenté un rapport au quatrième Congrès national du peuple en janvier 1975. Il a formulé la fameuse politique des « quatre modernisations » visant l’agriculture, l’industrie, la défense, la science et la technologie. En 1976, Mao et Zhou étant partis, les bases d’un pays fort et autonome avaient été jetées et la Chine continentale disposait (1) d’une main-d’œuvre très nombreuse et en bonne santé ayant reçu une éducation de base, (2) d’une énorme batterie d’entreprises industrielles d’État dans tous les secteurs, (3) des infrastructures, de l’énergie et des communications nécessaires à la poursuite de la croissance économique, (4) d’une économie grevée par une dette extérieure extrêmement faible (2,99% du revenu national brut en 1981).

 

Indicateurs socio-économiques :

À l’exception de trois intermèdes – le Grand Bond en avant (1958-60), la Révolution culturelle prolétarienne (1966-69) et la lutte politique post-Mao (1976-78) –, les différents secteurs de l’économie chinoise (agriculture, mines, industrie manufacturière) ont joui d’une croissance saine, quoique assez fréquemment freinée par de fréquents changements de politique. Les économistes estiment qu’au cours de la période 1952-1978, le PIB réel par habitant de la Chine a augmenté à un robuste taux annuel moyen de 4 %, que la part industrielle du PIB est passée de 20,9% en 1952 à 47,9% en 1978 (selon le Bureau national chinois des statistiques), que la productivité de la main-d’œuvre industrielle a augmenté de 236,7% et celle de la main-d’œuvre agricole de seulement 25,5% au cours de la même période. La proportion de la population active travaillant dans l’agriculture est passée de 83% à 75%, et la valeur ajoutée produite dans l’agriculture est passée de 78% en 1953 à 30% en 1977. L’espérance de vie à la naissance s’est améliorée, passant de 43,5 ans en 1960 à 66,5 ans en 1978, selon les données de la Banque Mondiale.

 

Année PIB Nominal

(En milliards d’ USD)

PIB per Capita

(en USD)

Population

(Milliards)

1952 30.55 54 0.569
1960 59.72 89 0.667
1970 92.60 113 0.818
1977 174.94 185 0.943

 

Observations significatives sur la Chine de Mao :

  1. En suivant le même chemin que l’URSS, la Chine, à partir de 1949, a mis en œuvre un mode de production qui était essentiellement du « capitalisme d’État ». L’URSS, en tant qu’État, était propriétaire des moyens de production et de la « marchandise » (qui, par définition, est intégrée à la valeur d’échange, c’est-à-dire à son « prix » sur le « marché ») qui était produite. Suivant un modèle similaire, la Chine a créé une nouvelle économie qui tournait également autour de la production de marchandises par des entreprises d’État, de la production agricole par des communes d’État et de l’accumulation de capital par l’État (par l’extraction des surplus de l’agriculture rurale et de l’industrie légère). En URSS et en Chine, les idéologues l’ont appelée « marchandise socialiste », mais le « socialisme » ne peut théoriquement pas s’accommoder de la production de « marchandise », qui fait intrinsèquement référence au « marché ».
  2. En fait, comme le suggère le marxisme, les concepts de « marchandise », de « marché », de « capital » et de « capital excédentaire » sont intimement liés à la « propriété » des moyens de production. Marx et Engels ont clairement indiqué que ces concepts n’avaient pas leur place dans la société socialiste/communiste. Il n’est pas vrai que la propriété ne concerne que les citoyens « privés », même l’« État » peut posséder des actifs à utiliser comme « capital » et c’est l’État et ses proches qui s’approprient. les bénéfices des entreprises publiques. Il ne fait aucun doute que Staline et Mao, adeptes très engagés de la philosophie et de l’idéologie de Marx-Engels-Lénine, avaient parfaitement conscience de la destination finale du voyage marxiste. Pourquoi alors ont-ils l’un et l’autre entrepris d’accumuler du capital dans les trésors publics ? Nous reviendrons sur cette question dans la dernière partie de cette emprunté à URSS était le punching-ball des dirigeants du PCC chaque fois qu’ils examinaient les résultats obtenus par rapport aux résultats prévus et qu’ils y trouvaient d’incommodes écarts (les résultats réels étant presque toujours inférieurs aux prévisions). La planification économique centralisée en tant que concept était correcte, mais le processus d’exécution présentait des lacunes. Tout d’abord, il aurait fallu établir des priorités sectorielles reflétant la réalité de la société : la société chinoise étant en grande majorité agraire, le premier plan quinquennal aurait dû accorder une importance primordiale à l’agriculture, puis à l’industrie légère, la machinerie lourde se situant au dernier niveau d’importance. Deuxièmement, la planification économique centralisée nécessite un ensemble de données exactes et complètes. Or, la Chine est un vaste pays avec de grandes différences régionales en termes de climat, de ressources naturelles, de normes sociales, de démographie, d’occupation, d’infrastructures, etc. Troisièmement, dans la réalité, la planification centrale était un processus descendant, quoiqu’avec la participation de tous les ministères et départements concernés. Dans un grand pays comme la Chine, une approche ascendante eût été préférable.
  3. Le gouvernement a introduit le système du hukou (originaire de la Chine médiévale) en 1958, grâce auquel tous les ménages ruraux sont enregistrés, ce qui permet aux membres de la famille d’avoir droit au logement, à l’éducation et aux soins médicaux dans leur lieu de naissance enregistré. D’une certaine manière, le gouvernement ainsi contrôlé la migration de la population rurale vers les régions urbaines et semi-urbaines. Les intellectuels qui considèrent les droits de l’homme comme un droit naturel inaliénable ont qualifié ce système de draconien. Cependant, ces dispositions ont été très efficaces pour contrôler la migration à grande échelle des chômeurs ruraux vers les zones urbaines, causant des problèmes socio-économiques dans les zones rurales et urbaines.
  4. L’esprit révolutionnaire de Mao n’a pas connu de limites. Et il avait assurément raison de souligner que (a) la sphère économique n’est pas la seule à devoir être transformée du capitalisme au socialisme, mais que la sphère culturelle de la société a également besoin de subir une telle transformation, (b) la révolution prolétarienne a un très long chemin à parcourir. Il n’était pas rare qu’il s’impatiente des politiques préalablement élaborées par lui-même et les siens. Mao n’était peut-être pas conscient du fait que les changements fréquents de politique et d’économie laissent des traces ressemblant à de l’inefficacité, mais peut-être, au fond, l’était-il. Au cours de la seconde moitié des années 1950, le rejet décisif des réalisations de Staline par le PCUS, l’atténuation des idéaux léninistes et le retrait de toutes sortes de soutiens soviétiques à la Chine ont fait prendre à Mao une conscience aigüe des défis globaux qui jalonnent la voie de la construction du socialisme dans un pays. Cela seul suffirait à expliquer ses hésitations en matière de questions politiques et ses réflexions sans fin sur les aspects socio-culturels de la révolution socialiste (territoire beaucoup moins arpenté par Lénine et Staline). Ainsi Mao a-t-il plongé plus que quiconque jusqu’au fond de trop de facteurs intangibles (hors économie politique) susceptibles d’influencer le résultat final d’une transformation communiste complète de toute société. [Trop ? NdT]

 

 

4. LA CHINE A L’ÉPOQUE DE DENG

Après une brève lutte pour le leadership, Deng Xiaoping a pris le contrôle du PCC en 1978. Lors de la troisième session plénière du 11e comité central du PCC, qui s’est tenue en décembre 1978 à Pékin, les dirigeants majoritaires du parti ont décidé d’entreprendre une réforme et une ouverture de l’économie. Ils ont répudié la Révolution culturelle de l’ère Mao. La réforme, telle que proposée par Deng, devait développer les forces productives en augmentant le rôle des mécanismes du marché et en réduisant celui de la planification gouvernementale.

La production agricole a été stimulée par une augmentation de plus de 22% des prix d’achat payés aux paysans pour les produits agricoles. Le système des communes a été décollectivisé mais l’État est resté propriétaire des terres et le système de responsabilité des ménages a été introduit dans l’agriculture à partir de 1979 : les familles d’agriculteurs individuels ont obtenu du gouvernement un « droit d’usage » sur des parcelles de terre (obtenues en morcelant les anciennes « communes »), ont pu réaliser des bénéfices en vendant leurs produits sur le marché, au lieu d’en livrer une petite quantité contractuelle à l’État à titre d’impôts. Cet arrangement a permis d’augmenter la productivité grâce aux incitations à bénéfices pour les agriculteurs, et environ 98% des ménages agricoles ont été intégrés dans ce système en 1984. En 1985, en employant 63% de la main-d’œuvre du pays, le secteur agricole a réalisé 33% du PNB, la production agricole a augmenté d’environ 25%. Parmi les produits agricoles, les céréales comme le riz, le blé, le maïs, l’orge, le millet, les cultures de rente comme les oléagineux, la canne à sucre, le coton, le jute, les fruits, les légumes, la volaille et les porcs sont désormais principalement produits par les familles paysannes. Bien que l’efficacité du secteur agricole se soit beaucoup améliorée – toutes les parcelles arables produisant au moins une récolte par an, et dans des conditions favorables, deux ou trois récoltes par an – les problèmes fondamentaux sont restés les mêmes qu’auparavant : petite taille des exploitations et insuffisance des équipements agricoles. 

Mise à part une catégorie importante de petites industries artisanales, les industries légères allaient constituer la deuxième catégorie, tandis que la catégorie des grandes industries comprendrait les centrales électriques, les raffineries de pétrole, les produits pétrochimiques, les produits chimiques, les engrais, le textile, l’acier, le ciment et l’automobile. Les réformes ont été ciblées sur les régions industrielles urbaines. Dans les secteurs industriels, les industries d’État ont reçu l’autorisation de vendre la production dépassant le « quota du plan » sur le marché, aux prix en vigueur, ainsi que l’autorisation d’expérimenter lun système de primes pour récompenser une meilleure productivité des employés. Le système de responsabilité industrielle introduit au milieu des années 80 a en outre permis à des individus ou à des groupes de gérer les entreprises d’État en passant un contrat avec le gouvernement. Les entreprises privées (qui avaient presque disparu après la révolution culturelle) ont été autorisées à fonctionner et la flexibilité des prix a été introduite. Progressivement, les entreprises à capitaux privés ont commencé à représenter un plus grand pourcentage de la production industrielle. En introduisant un processus moderne de gestion des entreprises commerciales, le gouvernement a permis aux gestionnaires de prendre le contrôle de leurs opérations commerciales, y compris le recrutement et le licenciement (avec l’approbation des bureaucrates et du PCC). Le secteur industriel a généré environ 46% du PNB en 1985 en n’employant qu’environ 17% de la main-d’œuvre totale en Chine. Les entreprises ont bénéficié d’autres incitations jusqu’à ce que, en 1985, la politique consistant à conserver le bénéfice net au sein de l’entreprise (après paiement de l’impôt sur le bénéfice au gouvernement) soit adoptée dans toute la Chine. En matière de banque et de financement, des changements de politique ont également eu lieu : des prêts bancaires ont été mis à la disposition des entreprises à un taux d’intérêt très bas, qui devaient être remboursés aux banques. Le soutien budgétaire du gouvernement a été réduit. Pour les industries, les procédures de commerce extérieur ont été facilitées (des zones économiques spéciales allaient bientôt être créées pour être à l’avant-garde du boom du commerce extérieur). Pour ce qui concerne la classe ouvrière, l’effet d’un environnement concurrentiel axé sur le profit a été cause que de nombreuses entreprises ont petit à petit remplacé les emplois permanents par des emplois contractuels à court terme et supprimé les programmes d’aide sociale aux travailleurs – ce qui a eu un impact négatif indubitable sur le niveau de vie et la sécurité sociale des travailleurs du secteur industriel. 

La décision politique la plus radicale prise par Deng a été sans aucun doute la politique de la porte ouverte aux investissements étrangers. À partir de janvier 1979, le gouvernement chinois a créé cinq zones économiques spéciales (ZES) à Shantou, Shenzhen, Zhuhai (toutes dans la province du Guangdong), Xiamen (dans la province du Fujian) et Hainan, où de nombreuses infrastructures supplémentaires, des incitations fiscales et l’absence d’un trop grand nombre de réglementations bureaucratiques ont été offertes aux investisseurs étrangers pour qu’ils puissent s’installer. Principalement axées sur l’exportation de marchandises, les cinq ZES accueillaient des coentreprises étrangères/chinoises ainsi que des sociétés étrangères à part entière. En 1984, la Chine a ouvert 14 villes côtières aux investissements des multinationales : Dalian (province du Liaoning), Qinhuangdao (province du Hebei), Tianjin, Yantai, Qingdao (toutes deux dans la province du Shandong), Lianyungang, Nantong (toutes deux dans la province du Jiangsu), Shanghaï, Ningbo, Wenzhou (toutes deux dans la province du Zhejiang), Fuzhou (province du Fujian), Guangzhou, Zhanjiang (toutes deux dans la province du Guangdong) et Beihai (dans la province du Guangxi). À partir de 1985, de nouvelles zones économiques ont été créées dans la péninsule de Liaodong, la province du Hebei, la péninsule du Shandong, le delta du fleuve Yangtze, le delta de la rivière des Perles, Xiamen-Zhangzhou-Quanzhou dans le sud de la province du Fujian et la région autonome Zhuang du Guangxi. Dans l’ère post-Deng, ces régions sont devenues des moteurs puissants de la croissance économique et des percées technologiques pour l’économie chinoise.

La politique de la porte ouverte a modifié le paysage du commerce extérieur en Chine. Avant les réformes, les exportations-importations combinées en 1969 représentaient 15% du PIB ; avec les réformes en 1984, elles sont devenues environ 20% et en 1986, elles ont atteint 35% du PNB. Les textiles, le pétrole et les denrées alimentaires étaient les principaux produits d’exportation, tandis que les machines, les équipements de transport et les produits chimiques étaient les principaux produits d’importation. En 1986, le Japon est devenu le partenaire commercial dominant avec 28,9% des importations et 15,2% des exportations. Dans le même temps, les USA sont apparus à l’horizon comme le troisième partenaire commercial global, juste après Hong Kong qui représentait 13 % des importations et 31,6 % des exportations. Sous Deng, les ZES et le commerce extérieur sont devenus des outils importants pour les investissements directs étrangers (IDE) et les technologies modernes. L’aspect le plus intéressant de l’effort industriel de la Chine est le « transfert de technologie ». Si, historiquement, la Chine a toujours été à la pointe de la science appliquée et de la technologie, à la fin du XVIIIe siècle, elle avait ralenti dans la course à la technologie par rapport à l’Europe de l’Ouest.

Outre d’énormes réserves de charbon, la Chine disposait d’importantes réserves de gaz naturel. Avec les nombreuses rivières traversant le pays, son potentiel hydroélectrique était parmi les plus importants au monde. Un grand nombre de centrales thermiques alimentées au charbon et de grands projets hydro-électriques ont été entrepris par le gouvernement pour produire l’énergie électrique nécessaire à une économie industrielle florissante. 

Il ne fait aucun doute que le programme de réforme global de Deng a remporté un succès impressionnant, mais il a également donné lieu à plusieurs problèmes socio-économiques graves : montée des factions attachées à l’économie politique de marché néolibérale au sein du PCC, autonomie de gestion dans les entreprises publiques et privées, corruption endémique, criminalité économique, élargissement des disparités entre les revenus, inflation incontrôlée et détérioration morale à grande échelle. Ces sujets de préoccupation ont provoqué une énorme tempête au sein du PCC et, en 1987,  le secrétaire général du parti, Hu Yaobang, a été contraint de démissionner. La faction de centre-gauche du PCC a bloqué certains des programmes de réforme. Les leaders étudiants, principalement à Pékin et à Shanghaï, fascinés par l’idéologie néolibérale du marché libre, ont attiré l’attention sur les problèmes socio-économiques de la société chinoise de l’époque et ont créé un mouvement (soutenu par l’État Profond capitaliste sioniste) visant à renverser le pouvoir du PCC. L’Armée Populaire de Libération a dû être mobilisée pour briser lune tentative de saisie du pouvoir par des étudiants protestataires sur la place Tiananmen à Pékin en juin 1989.

En novembre et décembre 1990, Deng a respectivement rouvert la Bourse de Shanghaï et établi la Bourse de Shenzhen. Le Congrès du Parti, en 1992, a fait écho aux vues de Deng en déclarant que la principale tâche à venir de la Chine serait de créer une « économie socialiste de marché ». En 1992, Deng a entrepris une « tournée du sud » au cours de laquelle il a souligné la nécessité de poursuivre les réformes pour ouvrir l’économie. Par ces actions, Deng a repris le contrôle du parti (qui avait été affaibli à la suite des manifestations de la place Tiananmen) en écartant les factions d’extrême gauche et de centre gauche du PCC. Il a aussi fait de Jiang Zemin le nouveau haut dirigeant du PCC. Un nouveau cycle de réformes du marché a été lancé, les entreprises privées et les entreprises appartenant aux gouvernements locaux profitant de prêts faciles des banques d’État pour développer leurs activités. Cela a de nouveau provoqué une inflation et un déficit budgétaire en 1993. La nouvelle politique de taux de change flottant et de convertibilité du renminbi a entraîné une dévaluation d’environ 33% du renminbi. L’investissement direct étranger a été encouragé et les entrées de capitaux en Chine ont afflué. L’économie s’est refroidie après que les entreprises appartenant aux gouvernements locaux ont transféré une plus grande partie de leurs revenus au gouvernement central et que les crédits bancaires ont été resserrés. Les exportations ont bondi en raison de la dévaluation. En 1996, l’économie a connu une croissance d’environ 9,5%, accompagnée d’une faible inflation.

S’appuyant sur la politique de libre-échange et de zone économique après 1990, le gouvernement a ouvert la nouvelle zone de Pudong à Shanghaï et les villes du delta du fleuve Yangtze aux investissements étrangers. Depuis 1992, le gouvernement a ouvert davantage de villes frontalières et de capitales de provinces et de régions autonomes.

Le nombre total d’entreprises industrielles en Chine est passé de 377.300 en 1980 à près de 8 millions en 1990. Pendant l’ère Deng, des niveaux d’inflation plus élevés sont apparus avec la réduction des contrôles gouvernementaux : en 1980, les prix à la consommation ont augmenté de 7,5% tandis qu’en 1985, l’augmentation était de 11,9% pour redescendre à 7,6% en 1986. En 1995, la Chine a exporté pour 24,7 milliards de dollars US vers les USA et pour 149 milliards de dollars US vers le reste du monde. En 1997, l’année du départ de Deng, la part de la consommation privée dans le PIB n’était que de 43% environ, tandis que la part des exportations dans le PIB était de 22% environ.

 

Changement des indicateurs socio-économiques :

Les économistes John Whalley et Xiliang Zhao ont estimé les performances impressionnantes de l’économie chinoise (en utilisant l’approche Barro-Lee) entre 1978 et 1999 :

  • Taux de croissance de la production – 9,72
  • Taux de croissance des intrants

o capital physique – 7,30

o travail – 2,03

o capital humain (représenté par le nombre moyen d’années de scolarité) – 2,81%.

  • Taux de croissance de la productivité totale des facteurs (PTF) – 3,64%.
  • Contribution à la croissance du PIB

o capital physique – 36,35

o travail – 10,78

o capital humain – 14,95

o productivité totale des facteurs – 37,93%.

 

Année PIB Nominal

(Milliards d’ USD)

PIB per Capita

(USD)

Population

(Milliards)

1980 306.17 312 0.98
1990 394.57 348 1.135
1997 961.60 782 1.23

 

Observations significatives sur la Chine de Deng :

1/ Le 14e Congrès national du Parti communiste, qui s’est tenu en 1992, a non seulement soutenu les efforts continus de Deng en faveur des réformes du marché, mais a également estimé que la Chine était sur la voie de la création d’une « économie socialiste de marché ». Il s’agissait de l’expression officielle du PCC pour documenter sa volonté de réforme en utilisant les forces du marché. Je doute que cette terminologie ait existé dans la Chine d’avant Deng ou dans l’URSS d’avant Gorbatchev.

Encore une fois, comme le proposait la théorie marxiste, le socialisme serait l’antithèse de l’économie de marché qui a été propulsée par le mode de production capitaliste. Dans la société capitaliste, les « facteurs de production » proviennent du « marché » et les marchandises sont vendues sur le « marché ». Dans le langage socialiste, le concept de marché ne devrait pas exister, quelle que soit la faction d’un parti communiste qui le propose  : « gauche », « droite » ou « centre ». Ce fut principalement l’incapacité des dirigeants du PCC de l’époque à réorganiser et à galvaniser l’économie rurale et urbaine pour libérer les forces productives qui les fit se lancer dans l’« économie de marché » qui n’est rien d’autre que le moteur des versions « mercantile »-« agraire »-« industrielle » du capitalisme, enraciné dans les sociétés d’Europe occidentale depuis le XVIe siècle.

2/ Deng a été le grand architecte de ce que l’on peut appeler « le poids lourd chinois de l’exportation ». La réforme du marché chinois a été entreprise beaucoup plus tard que celle du Japon et des autres tigres asiatiques. À partir des années 1980, l’exportateur tardif a fait un travail splendide en absorbant d’énormes quantités d’investissements et les dernières technologies de fabrication. La relative stagnation du niveau de vie urbain et la baisse du niveau de vie rural ont entraîné un transfert massif de la main-d’œuvre rurale vers le secteur exportateur en pleine croissance. En outre, les entreprises d’État disposaient déjà d’une main-d’œuvre disciplinée, éduquée et qualifiée, ce qui a facilité l’entrée des grandes sociétés multinationales sur le marché chinois. Des géants comme Boeing et Toyota ont démarré leurs activités en Chine en collaborant avec des entreprises d’État chinoises actives dans le même secteur (aéronautique ou automobile). Cet environnement est un autre héritage de l’ère Mao. L’attrait de la Chine pour le capital mondial a été renforcé par la persistance du faible niveau des salaires des travailleurs par rapport à d’autres pays asiatiques comme le Japon ou Singapour, ainsi que par la pression concurrentielle entre les provinces locales qui se sont livrées à une course effrénée pour atteindre une forte croissance du PIB en offrant des conditions ultra favorables aux investisseurs étrangers (allant des allégements fiscaux aux terrains industriels gratuits).

Contrairement au Japon et aux autres Tigres asiatiques qui se sont construits sur la base d’entreprises privées, le gouvernement chinois s’est appuyé sur les deux types d’entreprises, publiques et privées, pour fabriquer et exporter une gamme étonnante de biens de consommation dans tous les coins du monde. Deng avait prévu ce boom économique qui a permis d’améliorer le niveau de vie de millions de Chinois instruits. Toutefois, l’économie chinoise n’a pu éviter les difficultés économiques à court terme provoquées par ces réformes rapides visant à promouvoir une économie orientée vers l’exportation. 

3/ Loin d’être un adepte de la pensée politique capitaliste libérale, Deng était un socialiste convaincu, contrairement à de nombreux dirigeants de l’URSS de l’époque. Les chercheurs doivent se rappeler que pour Deng, l’« économie de marché » était « une méthode consistant à utiliser un chat noir pour attraper des souris au lieu d’utiliser un chat rouge », et que le développement des capacités en Chine suivrait la politique « cacher sa force, attendre son heure ». À mon avis, Deng n’a jamais douté de l’issue finale de la vision marxiste selon laquelle l’histoire sera en définitive écrite par la société communiste sans classes. D’où son conseil de se renforcer.

En autorisant le déploiement des forces de l’APL pour expulser par la force les étudiants protestataires de la place Tiananmen en 1989, Deng était clair sur le fait que les dirigeants des étudiants protestataires étaient des idéologues capitalistes libéraux qui essayaient de faire tomber le régime du PCC en Chine en utilisant le mécontentement du peuple face à la corruption, à l’inflation et au népotisme. Si Deng et la plupart des autres hauts dirigeants avaient cru à un iota de la philosophie capitaliste libérale, en 1991, des mots comme « socialisme », « communisme », « marxisme » auraient été complètement effacés, même de l’histoire écrite de la civilisation.

Source : Bridging China’s past with humanity’s future – Part 1 | The Vineyard of the Saker

 

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Juin 2022

 

 

 

 

 

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