Ukraine, les vapeurs de la folie

 

 

 

 

Jimmie Moglia – Your Daily Shakespeare – 16.3.2022

Traduction : c.l. pour L.G.O.

 

 

 

 

 

 

En ± 50 avant notre ère, le poète latin Publilius Syrus a dit : « In nil sapiendo vita lucundissima est » (Ne rien savoir rend la vie des plus délicieuses.) Et, en 1788, le poète anglais Thomas Gray a rendu ainsi l’idée en anglais : “Where Ignorance is Bliss, It is Folly to be Wise.” (Où l’ignorance est une benediction, ce serait folie qu’être sage).

 

Le préambule est nécessaire, je pense, pour deux raisons. Je ne prétends pas être exempt d’ignorance, mais il se peut que l’un ou l’autre lecteur ne soit pas d’accord avec les idées exposées ici. Si c’est le cas, je lui suggérerai de garder à l’esprit l’une des meilleures phrases de Marc Twain, « Dans toutes les questions d’opinions, nos adversaires sont cinglés » et de l’appliquer en conséquence.

La deuxième raison est que les émotions l’emportent souvent sur la vérité objective, notamment et surtout lorsque les maîtres de la manipulation de masse savent comment susciter des émotions, des impulsions et des passions souvent de la plus basse espèce. Et cela ne se limite pas aux émotions. Par exemple, le secrétaire américain à la défense Donald Rumsfeld, aujourd’hui décédé, a fait une affirmation remarquable en réponse à un journaliste, pendant la guerre en Irak. Le journaliste avait apporté des preuves irréfutables que ce que Rumsfeld venait de déclarer avec insistance était un mensonge. Incapable de le contredire, Rumsfeld a laissé passer quelques longues secondes avant de répondre : « Nous créons notre propre réalité ».

Par conséquent, le lecteur dissident peut choisir entre l’option de Twain et celle de Rumsfeld, pour ce qui concerne les sujets traités ici.

Mon intérêt pour l’Ukraine ne date pas d’hier. J’y suis allé pour la première fois autour de mes vingt ans en qualité d’artiste et je n’ai rien trouvé à redire sur ce pays, qu’il s’agisse des gens, de l’environnement ou de la nature. C’était encore le temps de l’Union soviétique, l’Ukraine était l’une des républiques soviétiques, mais mes impressions étaient absolument apolitiques. Il est certain que la jeunesse façonne ses perceptions et qu’au milieu de personnes accueillantes et amicales, nous voyons tous la vie à travers les lunettes roses métaphoriques.

 

Pour citer William Wordsworth,

« Quelle félicité c’était, dans cette aube, qu’être vivant,

Mais être jeune, c’était vraiment le paradis ! »

 

Néanmoins, mon intérêt pour l’Ukraine ne s’est pas éteint au cours des nombreuses années qui ont suivi. En fait, il y a quelque temps, j’ai produit (pour une chaîne de télévision de Portland) une histoire de l’Ukraine en 6 épisodes qu’on  peut trouver sur mon site Web www.yds.com en cherchant dans la section vidéo.

De l’avis d’historiens respectables, il existe, culturellement et traditionnellement parlant, deux Ukraines, l’Ukraine « occidentale » catholique et l’Ukraine « orientale » orthodoxe. Un autre groupe ethnique, important quoique minoritaire, était et est toujours une secte qu’on ne peut nommer sans se faire censurer.

Comme on le sait, la « Russie » est en fait née à Kiev, comme dans « Kievan Rus ». Pour des raisons impossibles à résumer en quelques lignes, au XIIIe siècle, la Rus en est venue à définir un agrégat ou une fédération de peuples slaves, baltes (notamment la Lituanie) et polonais. Aujourd’hui, le Belarus, la Russie et l’Ukraine ont pour ancêtre culturel historique la Rus de Kiev.

Au bout de 300 ans, au cours desquels les célèbres Cosaques se sont imposés avec leurs coutumes et leurs manières martiales – cherchant le souffle de la gloire dans la bouche du canon (1) dirait Shakespeare – l’histoire nous amène à l’accord de Pereyaslav. Dans cet accord, Bodan Khmelnytsky, qui avait dirigé une révolte contre la domination polonaise, demanda au tsar de Russie d’accueillir l’Ukraine, en qualité de duché autonome, au sein de la Russie. Ce qui finit par s’accomplir. On peut donc affirmer que l’Ukraine est devenue un morceau de la Russie en 1654.

Par un caprice du destin et de la politique, en 1954, pour célébrer le 300e anniversaire de la naissance pratique de l’Empire russe, Khrouchtchev a décidé de donner la Crimée, très ethniquement russe, à l’Ukraine.

Il s’agissait d’une renaissance post-stalinienne des nationalités des républiques individuelles, comme moyen d’atténuer l’impact et le poids historique du bolchevisme, responsable, entre autres, de la famine pratique et de la mort consécutive de millions de personnes pendant l’Holomodor – un mot ukrainien qui signifie d’ailleurs la mort par famine [c’est du moins la fable qui circule et que les historiens sérieux ont prouvée fausse, NdT]. Ce serait un peu la même chose que s’il prenait à un hypothétique premier ministre britannique pro-norvégien la fantaisie d’offrir l’Écosse à la Norvège, et que, quelque temps plus tard, les Écossais norvégiens ne soient pas du tout satisfaits de la tournure des événements politiques en Norvège et veuillent retourner dans leur patrie britannique. Les Norvégiens se mettraient alors en devoir de bombarder et de tuer un grand nombre d’Écossais. C’est ce qui s’est passé dans la vie réelle, non pas en Norvège mais dans le Donbass, qui, soit dit en passant, signifie le bassin du Donbass.

Compte tenu de l’association intuitive entre religion et culture, bien qu’il n’y ait jamais eu de problèmes ethniques en Ukraine avant que la CIA ne s’active à créer les conditions actuelles, la partie de l’Ukraine située à l’est du fleuve Dniepr et la majeure partie du nord sont principalement de confession chrétienne orthodoxe, tandis que la région située à l’ouest du fleuve Dniepr (en particulier la région située plus à l’ouest de la Galicie, qui a fait partie de la Pologne au cours de l’histoire) était principalement catholique

Fait généralement inconnu, sauf peut-être des Lituaniens, la Lituanie, aujourd’hui relativement petite, était autrefois un grand État, en fait, un grand-duché qui comprenait une partie de l’Ukraine actuelle.

À titre d’aparté géographique, bien que l’exclamation shakespearienne « Honte, où est ta rougeur ?» ait quelque peu perdu de son mordant, du moins dans les cercles politiques, je pense qu’elle peut encore s’appliquer à l’actuelle ministre, britannique, qui, au cours d’une récente réunion internationale, a fait preuve d’une ignorance manifeste de la différence géographique entre la Russie et l’Ukraine.

Pour en revenir à l’Ukraine : au XIXe siècle, comme nous le savons, une vague de nationalisme a déferlé sur l’Europe à la suite de la quête inspirée de Napoléon de gloire pour la France. Le nationalisme a aussi inspiré le romantisme dans la littérature et dans l’art. Et il y a eu, en outre, des jeux de pouvoir stratégiques impliquant l’Angleterre, l’Autriche, la France et une Allemagne de plus en plus forte. Pourtant, le mélange de romantisme et de nationalisme a conduit à la naissance d’un certain nombre d’États européens, comme l’Italie, qui l’est devenue (État) en 1861.

Même le poète Byron est allé en Grèce pour libérer les Grecs de la domination turque. Mais avant d’avoir pu attaquer la forteresse turque de Lépante, près du golfe de Corinthe, il est tombé malade. À l’époque, l’équivalent du mortel vaccin anti-Covid était la saignée. Néanmoins, Byron s’est rétabli partiellement. Peu de temps après, malheureusement, il a attrapé un mauvais rhume qui, traité par de nouvelles saignées, a été suivi d’une forte fièvre qui a fini par causer sa mort.

En Ukraine, pour interprèter la vague de l’idéologie romantico-nationaliste il y eut le poète Taras Chevchenko. Son influence littéraire a transformé l’ukrainien d’un dialecte en une langue officielle. Nous pouvons donc considérer Chevtchenko comme le Shakespeare et le Dante Alighieri de l’Ukraine.

Soit dit en passant, comme on le savait, un des points de discorde, après la révolution de 2014, dite « de Maïdan », provoquée et financée par les États-Unis, est celui de la langue. C’est-à-dire la notion présomptueuse selon laquelle les Ukrainiens qui parlent russe devraient se voir interdire de parler leur langue maternelle.

Bien que ma connaissance du russe ne dépasse pas une vingtaine de mots et quelques phrases, les langues russe et ukrainienne se ressemblent beaucoup. Dans mon entreprise, nous avions un très bon client ukrainien. Et j’ai été témoin de dialogues entre lui parlant ukrainien et un employé russe parlant russe, l’un et l’autre se comprenant parfaitement.

À titre de comparaison, il y a quelques années, j’ai visité avec mon fils cadet la région des Abruzzes, dans le centre de l’Italie, et au déjeuner, nous nous sommes assis près d’une table de gens de l’endroit qui conversaient entre eux de façon suffisamment sonore pour être entendus. Ils parlaient leur dialecte, et moi, je comprenais moins de 5 % de ce qu’ils disaient.

Cependant, hypothétiquement parlant, l’interdiction présomptueuse du russe par le gouvernement ukrainien actuel sous tutelle américaine, correspond à un État des Abruzzes hypothétiquement indépendant, qui interdirait l’usage de l’italien sur son sol.

Comme on sait, lors de la première guerre mondiale, la Russie, après avoir perdu la guerre, a également perdu, par le traité de Brest-Litovsk, une partie de son territoire, qui est allée à la Pologne. Toutefois, lors du fameux pacte Ribbentrop-Molotov de 1939, la Russie bolchevique a réclamé ce territoire ukrainien qu’elle avait perdu à l’issue de la première guerre mondiale au bénéfice de la Pologne.

Comme on le sait également – bien que l’histoire officielle soit ambiguë ou silencieuse sur le sujet – pendant la Deuxième Guerre mondiale, l’Ukraine était tout sauf une et indivisible, dans sa position vis-à-vis de l’Allemagne et de la Wehrmacht. Il est possible et probable que la population dans son ensemble n’avait pas oublié l’Holomodor – terme ukrainien, je le rappelle, qui signifie  mort par la faim – lequel s’était produit relativement peu d’années auparavant.

Par conséquent, la partie polonaise de l’Ukraine en particulier a été ouvertement pro-allemande. Chose généralement ou stratégiquement oubliée, un bon nombre de Polonais ou d’Ukrainiens de l’Ouest ont été employés comme gardiens dans les camps de concentration allemands. De célèbres procès de règlements de comptes qui se sont déroulés après la Deuxième Guerre mondiale ont concerné certains de ces gardes ukrainiens.

Je dois ici introduire une parenthèse : Jim Traficant fut un membre du Congrès américain haut en couleur, ancien fermier, ancien shérif, homme éduqué quoique – ce qui s’est avéré être un handicap – quelqu’un d’honnête. Il a fait les gros titres de la presse nationale en refusant de saisir les maisons de plusieurs petits propriétaires au chômage. Ça s’est passé dans les années 1980, quand le Midwest industriel est devenu une ceinture de rouille en raison de la délocalisation des industries en Chine ou au Mexique.

J’ai écrit un article sur lui, et ceux qui sont intéressés peuvent toujours le trouver sur mon site web, en cherchant l’entrée « Death of an Unsung Hero ». Quoi qu’il en soit, les apparatchiks du peuple élu avaient kidnappé un Ukrainien aux États-Unis et l’avaient emmené en Israël pour le juger et probablement l’exécuter, pour avoir été gardien dans un camp de concentration.

La famille de l’accusé a fait appel à Jim Traficant et lui a démontré, preuves à l’appui, qu’il s’agissait d’un cas classique d’erreur d’identité. Sur ce, Traficant, contre l’avis de ses conseillers politiques, a pris sur lui de se rendre en Israël et de témoigner au tribunal, où il a présenté les preuves indéniables de l’innocence de l’accusé.

Ils ont dû relâcher l’accusé à tort – mais ils n’ont pas oublié. Peu de temps après, ils ont fabriqué de fausses accusations de corruption. Comme preuve de la mainmise totale du pouvoir qu’on ne peut pas nommer sur le Congrès américain, un seul membre a voté contre son expulsion du Congrès. Et il a été condamné à 7 ans de prison pour corruption. Il pouvait toutefois bénéficier d’une grâce, à condition de reconnaître sa culpabilité. Sa réponse devrait être gravée dans la pierre, quelque part près de la véritable scène du crime à Washington DC. « Votre grâce – a-t-il dit – fourrez-vous la dans le cul ! »  et il a purgé ses 7 ans.

Mais je digresse, revenons à l’Ukraine.

Le représentant le plus connu de l’élément ukrainien pro-allemand était Stepan Bandera, né en Galicie en 1909, quand la région faisait partie de l’empire austro-hongrois, qui devint ensuite un ardent nationaliste ukrainien.

Et c’est suite à l’invasion de la Pologne par l’Allemagne et à la déclaration de guerre contre l’URSS, que Bandera a préparé la Proclamation de l’État ukrainien du 30 juin 1941 à Lvov, s’engageant à collaborer avec l’Allemagne nazie.

Après la guerre, il a travaillé pour diverses organisations anticommunistes et a finalement été assassiné à Munich en 1959, par le KGB paraît-il.

En 2010, le président ukrainien de l’époque, Viktor Iouchtchenko (un triste sire installé par les USA), a nommé Bandera Héros de l’Ukraine à titre posthume.

Exemple typique de confusion idéologique dans les républiques indépendantes russes post-soviétiques, certains Ukrainiens saluent en Bandera un libérateur qui a combattu avec les nazis contre les Soviétiques, et en même temps essayé d’établir une Ukraine indépendante. Alors que d’autres Ukrainiens, ainsi que la Pologne et la Russie, le condamnent comme un criminel de guerre fasciste qui, avec ses partisans, a perpétré des massacres de civils polonais, ukrainiens et en particulier de Juifs. En fait, comme je l’ai déjà mentionné à propos de Jim Traficant, Israël a même kidnappé et jugé certains gardiens ukrainiens des camps de concentration…

Cependant, et c’est là un curieux paradoxe du moment historique actuel de l’Ukraine, Bandera est le personnage symbolique idéologique de diverses formations actuelles de l’armée ukrainienne, qui, étant donnée l’allégeance historique de Bandera, arborent des symboles nazis dans leurs célébrations et leurs drapeaux : notamment le bataillon Azov et le Pravi-Sector.

En 2011, le président ukrainien élu Viktor Ianukovytch (finalement renversé par le coup d’État de la CIA de 2014) a annulé le titre et la célébration. Mais l’actuel président Zelenski a rétabli les hommages à Bandera et même changé le nom d’une des principales avenue de Kiev et fait de l’Avenue de Moscou une Avenue Stepan Bandera.

Parmi de nombreux paradoxes en cours, l’actuel président ukrainien Zelenski appartient au peuple élu, tout comme son premier ministre et l’oligarque qui les y a placés, curieux personnage (euphémisme !) de la scène politique ukrainienne actuelle nommé Ihor Kolomoïsky. Zelenski est/était un comédien soutenu par Kolomoïsky. Et, comme je vous l’ai déjà dit, dans l’un de ses sketches, avant d’être élu président, on le voit jouer du piano avec son pénis. J’ai écrit un article sur Kolomoïsky intitulé « Ukraine, Shakespeare et les oligarques », dans lequel les citations, que j’ai généreusement incluses dans l’article, permettent au lecteur de se faire une idée du personnage mieux que je ne le pourrais en offrant ma propre description.

Pour faire un bref rappel historique, l’URSS, surtout après la Deuxième Guerre mondiale, a encouragé le sentiment « nationaliste » parmi les différentes républiques soviétiques. Selon les historiens, cette politique était destinée à servir d’équilibre entre l’idéologie niveleuse (associée au bolchevisme) et la phase post-bolchevique de l’URSS, encourageant une sorte de fierté ethnique, toujours dans un contexte de philosophie marxiste.

Puisque parfois nous utilisons des pailles pour porter un jugement, je ne suis pas un « crypto-communiste », et ce pour une raison simple : étant donné que l’égalité entre les humains est physiquement et philosophiquement impossible, il se trouve que toute structure impliquant plus de deux personnes nécessite un chef. Ce qui est le premier pas vers l’inégalité, qui s’amplifie au fur et à mesure que la taille du groupe augmente, même sous le – disons régime – le plus égalitaire et communiste. C’est une théorie bien expliquée dans le livre intitulé Les partis politiques, écrit au début du XXe siècle par un auteur appelé Robert Michels [Moglia le dit britannique, mais c’était un sociologue allemand, NdT].

La lutte entre le maintien d’une égalité théorique et d’une inégalité pratique crée un certain nombre de paradoxes moins faciles à surmonter que ceux qui existent dans les sociétés non-marxistes. Ceci est, j’en conviens, une simplification très critiquable mais, en fin de compte, le degré d’harmonie d’une société est directement proportionnel à l’honnêteté moyenne de ses dirigeants, et commence par celle-ci. À son tour, l’honnêteté est elle aussi affectée par des valeurs culturelles généralement historiques et cultivées. Mais je digresse encore. Abandonnons ce sujet notoirement épineux.

Toutefois, dans le contexte de cet épineux dilemme – quel est le « système » optimal de gouvernement – je décrirai un épisode auquel j’ai participé dans la Russie encore soviétique, ainsi que deux observations populaires ou aphorismes ou mots d’esprit ou maximes russes historiquement récents.

Lors d’une visite à Moscou, je dînais dans un restaurant où mon guide et moi partagions une table avec une famille russe. Pendant le dîner, la famille a posé des questions au guide à mon sujet, vu qu’à l’époque, un visiteur « occidental » était encore considéré comme un objet de curiosité. Une des questions était : « D’où vient-il ? ». Pensant instinctivement que la réponse « U.S ? » n’aurait peut-être pas été comprise, j’ai dit « États-Unis d’Amérique ». Et pendant tout le dîner, j’ai vu que le chef de famille me regardait de temps en temps et répétait « Les États-Unis d’Amérique ». Cette répétition m’a semblé être l’expression d’une imagination convaincue que « les États-Unis d’Amérique » étaient un pays idéal, comparé à ce qu’il pensait être sa propre Russie à l’époque.

Puis est venu le démantèlement de l’Union soviétique, qui reste un épisode assez trouble, parce que, comme on le sait, lors du plébiscite russe correspondant, la majorité voulait conserver l’union, quoique sous un nouveau régime.

Mais, après la dissolution, deux mots d’esprit ou si on veut deux maximes sont devenues très populaires en Russie.

L’une disait : « Tout ce que le gouvernement soviétique nous disait sur la Russie était faux, mais tout ce qu’il nous disait sur l’Occident était vrai ».

Et l’autre: « Dans les pays communistes, il faut avoir du pouvoir pour avoir de l’argent. Dans les pays capitalistes, il faut avoir de l’argent pour avoir du pouvoir ».

Il y a beaucoup de sagesse dans ces deux aphorismes, car ils expliquent l’apparition des oligarques tant en Russie que dans les anciennes républiques. La signification du terme oligarque a évolué ces derniers temps. Oligarchie est un mot grec qui signifie « gouvernement par un petit nombre ». Récemment, il s’est mis à désigner des personnes qui se sont énormément enrichies en volant des biens publics.

J’aborde maintenant certains des désastres qui ont suivi la dissolution de l’Union soviétique. Ces désastres se sont répercutés, ou du moins reflétés, dans ce qu’on appelle l’Union Européenne qui, malgré la propagande dénaturante, peut être considérée comme l’image inversée de la dissolution de l’Union soviétique. Car, alors que l’URSS a été dissoute pour que les différentes républiques puissent être indépendantes, les différentes républiques d’Europe ont perdu leur indépendance pour pouvoir devenir membres de ce que j’appelle la QSEU (Quasi Soviet European Union). À la différence qu’en Union soviétique, malgré les efforts qu’ont fait les bolcheviks pour annuler l’histoire et la culture russes, ils n’y ont pas réussi. Alors que la QSEU (Quasi Soviet European Union), en se pliant comme une esclave aux diktats des apparatchik ou Congrès américain (que beaucoup décrivent comme un territoire occupé par Israël), embrasse avec enthousiasme la culture « d’annulation » : un exemple de cas historique où la définition a rarement été aussi précise.

La partie suivante de mon récit est un résumé rapide de ces dernières années. L’intention, ici, est de mettre en relief les caractéristiques les plus significatives, peut-être perdues dans le flot turbulent des événements.

Il existe une perception générale selon laquelle les républiques de l’Union soviétique étaient une construction bolchevique. Ce n’est pas le cas, car à part les États baltes, toutes les autres républiques faisaient partie de l’empire russe depuis l’époque de la Grande Catherine.

Avant la séparation historiquement récente d’avec la Russie en 1991, l’économie de l’Ukraine était, selon certains économistes, juste en dessous de celle de la France. Elle comprenait des technologies de pointe de toutes sortes, de l’aviation aux fusées spatiales en passant par les voitures. D’ailleurs, le plus gros avion du monde, l’Antonov 225 – aujourd’hui apparemment endommagé ou détruit – était produit en Ukraine. Néanmoins, la production était strictement interconnectée avec la Russie et, après l’indépendance et le chaos subséquent dans les deux pays, toute l’industrie a été essentiellement paralysée.

De 1991 à 2004, les présidents de l’Ukraine ont été Leonid Kravchuk et Leonid Koutchma. Tous deux avaient occupé des postes au sein du gouvernement communiste de l’URSS. Le pays était indépendant mais restait étroitement lié à la Russie en raison des 70 ans d’interdépendance.

Le 1er juin 1996, l’Ukraine est devenue une nation non nucléaire, en retirant ses 1.900 ogives nucléaires stratégiques. L’Ukraine s’était engagée à le faire en signant le Mémorandum de Budapest sur les Assurances de Sécurité en janvier 1994.

En 2000, à la suite d’un scandale impliquant le meurtre d’un journaliste, les États-Unis ont accusé Koutchma d’avoir vendu des systèmes radar à Saddam Hussein – accusation qui s’est par la suite avérée aussi fausse que celle sur les armes de destruction massive. Mais les États-Unis n’aimaient pas Koutchma : en 2004, il ne s’est pas représenté aux élections. Le nouveau vainqueur a été Ianoukovytch, par une marge étroite sur Iouchtchenko, le candidat que les États-Unis voulaient faire gagner. La Cour suprême a déclaré le résultat nul et non avenu. Et le non élu Iouchtchenko est devenu président.

Iouchtchenko a renforcé les liens avec les États-Unis et leur implication en Ukraine. Pendant son mandat, il y a eu le scandale du gaz destiné à l’Europe qui a été volé dans les gazoducs russes alors qu’il traversait l’Ukraine.

En raison de sa personnalité haute en couleurs, il faut aussi parler d’un personnage qui est apparu à l’époque de Iouvtchenko : Ioulia Timochenko, qui, en 2010 s’est présentée à la présidence contre Iouvtchenko et Ianoukovytch. Cette fois, c’est Ianoukovytch qui a gagné.

Ioulia Timochenko était devenue une ennemie acharnée de Iouvtchenko. Et il y avait concours entre les deux sur qui était le plus anti-russe. Par exemple, en 2014, les journaux ont rapporté la déclaration de Ioulia: « Il faut tuer les Russes aux armes nucléaires ».

Néanmoins, aux élections suivantes, Ianoukovytch a de nouveau gagné.

En février 2014, nous avons la révolution orange, ou plutôt rouge sang, appelée Euromaïdan. Elle ne vaut la peine d’être mentionnée que pour souligner le rôle du Département d’État et en particulier de cette sinistre figure qu’est Victoria Nuland, dont l’expression peut difficilement cacher l’âme diabolique, comparée à laquelle Lady Macbeth a l’air de Mère Theresa.

L’insondable hypocrisie qui sous-tend toute l’opération est symboliquement mise en évidence par la conversation historique, bien que vomitive, entre Nudelman et l’ambassadeur américain en Ukraine, lorsqu’ils discutèrent si délicatement des membres à nommer dans le nouveau gouvernement. À la question de l’ambassadeur de savoir si « les Européens » ne pourraient pas s’opposer à l’une ou l’autre de ces nominations, Nuland répondant avec la grâce féminine qui la caractérise : « Fuck the Europeans !» [autrement dit « J’encule les Européens ! »]. À la fin de la conversation, l’ambassadeur ne pouvant que conclure avec satisfaction : « notre gâteau est tombé avec le côté ensoleillé au-dessus », ce qui signifiait bien sûr : «  mission accomplished ». Qui sait, c’est peut-être en pensant à l’Ukraine et aux États-Unis que Churchill a dit « Tel pays, tel gâteau ».

Comme nous le savons, Ianukovytch avait accepté de nouvelles élections, mais pour les États-Unis, ce n’était pas encore suffisant. Il s’en est suivi une farce tragique dans laquelle – comme le reconnaît même une conversation enregistrée dont le texte est dans le domaine public – Catherine Ashton, à l’époque vice-présidente de l’Union européenne, parle des « révolutionnaires de couleur », qui étaient des mercenaires de divers groupes nazis, tirant en même temps sur les manifestants et sur la police.

Le conflit s’est poursuivi et la Crimée, à majorité russe, a finalement été annexée par la Russie le 18 mars 2014 à la suite d’un référendum.

Après le coup d’État, c’est l’oligarque Porochenko qui est devenu président. « Élu » grâce au soutien des États-Unis, Porochenko était férocement anti-russe.

En février 2019, la Constitution de l’Ukraine a été modifiée, et les normes relatives au parcours stratégique de l’Ukraine en vue de son adhésion à l’Union européenne et à l’OTAN ont été intégrées au préambule de la nouvelle Constitution.

Porochenko, tout comme ses prédécesseurs, a été impliqué dans divers scandales financiers. Sa « réussite » la plus notoire est toutefois la séparation d’avec l’Église orthodoxe de la Russie et la création d’une Église orthodoxe ukrainienne nationale. Plus ou moins, cela équivaut à séparer l’église catholique de France de celle de Rome et d’élire un pape français à usage interne.

En avril 2019, l’acteur Zelenski a « remporté les élections ». Zelenski fait partie du peuple élu, tout comme l’actuel premier ministre ukrainien et leur parrain Kolomoïsky. Une triade intéressante, qui donne à réfléchir. En Occident, quiconque oserait discuter si peu que ce soit l’« holocauste » se retrouverait en prison, comme c’est le cas de l’Allemande et ultra-nonagénaire Ursula Haberbech. Mais en Ukraine, la présence de bataillons indubitablement nazis au sein des forces militaires du pays ne fait même pas sourciller.

Zelenski est apparemment un acteur talentueux. Dans l’un de ses sketches, peu de temps avant qu’il devienne président, lui et un autre jouent du piano avec leur pénis. Je ne vois pas en quoi c’est drôle, mais c’est sans doute moi qui suis limité.

Quelques mots sur le rôle de la famille Biden dans tout cela. Comme on le sait, le fils de Biden s’est trouvé un bon emploi dans une société basée à Chypre mais opérant en Ukraine, appelée Burisma, qui effectue (ou a effectué) officiellement des explorations pétrolières, mais n’a jamais rien trouvé. Le modeste salaire de Biden fils était de 50.000$ par mois. Interrogé à ce sujet au moment des élections, Biden a déclaré qu’il ne l’avait appris qu’après que Biden Jr. eut été engagé par la Birmanie.

Mais c’est alors que le procureur général ukrainien a ouvert une enquête sur la société Burisma ainsi que sur le rôle associé de Biden Jr. Biden Sr. s’est alors rendu à Kiev – et il s’en vante dans une vidéo existante et disponible, où il  déclare :

 

 « … et j’ai obtenu une assurance de Porochenko et de Yatseniuk qu’ils prendraient des mesures contre le procureur de l’État et ils sont sortis de la conférence de presse et ont dit, « ce n’est pas une assurance de la 11e heure que nous vous donnons ». Ils ont dit vous n’avez pas d’autorité, vous n’êtes pas le président, et que je devrais appeler le président… J’ai dit, “vous n’aurez pas le milliard de dollars, je pars d’ici, je pense que c’était dans environ 6 heures. Si le proc (procureur) n’est pas viré, vous n’aurez pas l’argent…” Le fils de pute [le procureur général], il a été viré. »

Pour Rudy Giuliani, l’ancien maire de New York, l’action avouée de Biden à Kiev relève du chantage, de l’extorsion et de la corruption de la justice.

Par ailleurs, avant son nouvel emploi en Birmanie, Biden Jr. s’est rendu au Kazakhstan pour « quelques affaires », comme le montre le fameux ordinateur portable qu’il n’a pas récupéré chez le réparateur. Peut-être s’agit-il d’une coïncidence fortuite, mais l’année dernière, le Kazakhstan a connu une révolution colorée et sanglante. Elle a échoué, mais son histoire, si elle est un jour écrite, pourrait s’avérer intéressante.

Compte tenu de l’agitation actuelle en Europe et en Ukraine, y aura-t-il une troisième guerre mondiale ? Je pense que non. Mais ne soyons pas trop sûrs. Pourquoi ? Le 16 février 2017, le journal britannique The Guardian a publié un article intitulé « Billionaires’ bolthole : how New Zealand became an escapee’s paradise » [Refuge pour milliardaires : comment la Nouvelle Zélande est devenue un paradis pour évadés »], où il est révélé que divers ultra-riches, oligarques et élus ont déjà préparé leur refuge contre une guerre nucléaire mondiale.

En conclusion, la rapidité, la portée totalitaire et mondiale des mesures anti-russes actuelles et l’intensité de la propagande occidentale ne devraient pas surprendre après l’affaire de la pandémie. Mais l’intrigue se corse, car il n’y a pas ici de problème de santé utilisé pour vendre la répression de la liberté et de la dissidence comme des mesures humanitaires. Il y a juste une guerre déclarée en Ukraine et non déclarée dans le reste du monde occidental, qui dissimule à peine l’objectif d’instaurer un nouvel ordre de capitalisme totalitaire soigneusement préparé. Un régime caractérisé par des démocraties dégradées, vidées de leur substance et une anthropologie dégradée où l’homme n’est que de la quintessence de poussière (2) et donc jetable, au caprice de n’importe quel maître, pour n’avoir pas su réagir.

Références :

_________________

                        
(1)  As You Like It
(2) Hamlet

Source : Ukraine, The Fumes of Madness – Your Daily ShakespeareYour Daily Shakespeare

URL de cet article : http://blog.lesgrossesorchadeslesamplesthalameges.fr/index.php/ukraine-les-vapeurs-de-la-folie/

 

 

 

Janvier 2023

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